Province Législature Session Type de discours Date du discours Locuteur Fonction du locuteur Parti politique Québec 29e 3e Débat sur le discours inaugural 7 mars 1972 M. Robert Bourassa Premier ministre PLQ M. le Président, je voudrais accueillir et souhaiter la plus cordiale bienvenue à tous les députés à l'occasion de la troisième session de cette Législature. Je voudrais profiter de cette occasion également pour remercier tous les députés du travail considérable qui a été fait au cours de la dernière session et depuis la fin de cette dernière session. Vous me permettrez, M. le Président, de signaler brièvement quelques changements comme la nomination d'un nouveau chef intérimaire du Ralliement des créditistes, à qui nous souhaitons la bienvenue. Au cours des années soixante, le Québec a choisi de s'ouvrir au monde industriel et scientifique. Ce brusque passage d'une société de traditions à une société de transformation a marqué et marquera longtemps encore l'évolution de nos institutions politiques, économiques, sociales et culturelles, car tout n'a pas été dit, loin de là, sur les conditions de notre appartenance au monde moderne et sur les diverses formes de notre existence collective. Mais ce que nous savons d'ores et déjà, c'est que des exigences précises doivent être satisfaites si nous voulons continuer les réformes entreprises et donner au Québec les bases solides de son avenir et les instruments de son progrès. Voilà ce à quoi nous nous employons sans sous-estimer la complexité grandissante des problèmes posés à toute société industrielle, mais sans pessimisme non plus, conscients qu'il y a dans nos ressources collectives assez de vitalité et de dynamisme pour dominer et résoudre nos problèmes. La soudaineté avec laquelle le Québec a passé, depuis dix ans, au travers d'étapes de transformations successives, a provoqué, comme il fallait s'y attendre, un malaise ou une inquiétude chez plusieurs d'entre nous. Cette inquiétude prend parfois une dimension insoupçonnée dès lors que se manifestent certains phénomènes, comme la contestation agressive et parfois désordonnée des règles du jeu social et de ses valeurs. Comme partout ailleurs, nous connaissons tous des difficultés d'adaptation aux changements. En assumant les responsabilités du pouvoir, nous étions bien conscients de cette nouvelle réalité de notre société. Nous en étions d'autant plus conscients qu'à ces problèmes d'adaptation des individus aux changements se greffait une crise d'identité nationale que nous ne pouvions ignorer. L'attitude du gouvernement, l'ouverture et le calme que nous manifestons devant les événements, cette priorité incontestable et nécessaire accordée aux questions économiques, notre action dans le domaine de la santé et des services sociaux, l'attention portée aux valeurs culturelles de notre société, la réforme entreprise des structures administratives de l'État et de ses opérations budgétaires, autant de faits qui témoignent de notre désir de voir le Québec surmonter ses problèmes. Notre politique, elle correspond à ce programme de gestion moderne des affaires québécoises que nous avions proposé aux Québécois lors des dernières élections. Nous allons poursuivre cette politique, convaincus que nous sommes qu'elle colle vraiment aux besoins et aux aspirations de la population québécoise. Notre attitude d'ouverture et de calme devant les événements ne laisse toutefois pas place au laisser-faire. Une société démocratique repose nécessairement sur un partage du pouvoir entre les individus et les groupes. Ce partage est toujours une question d'équilibre dont l'État est le premier responsable. L'arbitrage des intérêts des uns et des autres comporte nécessairement des exigences de fermeté, surtout lorsque l'autorité aussi bien que la légitimité des grandes valeurs démocratiques sont mises en cause et quand la sécurité et l'intérêt public sont menacés. Ces exigences de fermeté, nous avons l'intention de continuer à les assumer. Par contre, il ne faudrait pas que ce devoir de fermeté soit confondu avec la nécessité qu'il y a pour le gouvernement de se montrer conscient du sort de tous ceux qui sont les victimes du changement. Certaines de leurs impatiences affectent peut-être le climat social. Ce n'est toutefois pas tellement au niveau de la façon dont ils expriment cette impatience que doivent se situer les causes qui sont à l'origine des injustices économiques et sociales qu'ils vivent. Il ne peut s'agir alors de parler en termes de majorité silencieuse ou de minorité bruyante. Il s'agit plus simplement d'une question de justice, de dignité humaine et de respect des droits de chacun. Nos efforts cherchent donc à maintenir le meilleur équilibre possible dans le développement des différents secteurs de notre vie communautaire. Fédéralisme décentralisé. C'est également dans une perspective d'équilibre, M. le Président, que le fédéralisme, malgré ses difficultés évidentes, constitue pour nous une option logique et préférable à tout autre, en raison des avantages relatifs qu'il apporte à l'ensemble de la collectivité québécoise. Le fédéralisme n'est pas et ne doit pas être un dogme. Il constitue simplement une réponse aux besoins d'organisation politique d'une société. Notre type de fédéralisme doit cependant coller davantage à nos réalités, correspondre vraiment aux besoins et aux aspirations à la fois des individus et de la collectivité québécoise. J'ai déjà eu l'occasion de dire que, dans un régime fédéral comme le nôtre, le degré de décentralisation donnait le plus souvent la mesure de la qualité et de l'efficacité des politiques gouvernementales. Cette prise de position ferme de notre gouvernement en faveur d'un fédéralisme décentralisé rencontre de plus en plus les vues de l'ensemble des membres de la fédération. La récente prise de position de l'Ontario en témoigne d'une façon éloquente. Si nous constatons également une nouvelle génération de premiers ministres dans la presque totalité des provinces du Canada, nous avons toutes les raisons d'être confiants pour arriver à une solution acceptable au Québec. De même, le partage des ressources fiscales entre le gouvernement central et les gouvernements provinciaux doit tenir compte de leurs responsabilités respectives. Bien que de nombreux travaux aient été effectués au cours des dernières années à ce sujet, nous devons déplorer la persistance d'un déséquilibre grave au niveau du partage des ressources financières. Cette situation limite les initiatives que doivent prendre les gouvernements provinciaux pour faire face à leurs obligations constitutionnelles. Le gouvernement du Québec estime que la recherche des moyens qui nous permettront de corriger cette situation est absolument essentielle au progrès du fédéralisme lui-même. Le déséquilibre actuel constitue en effet un élément déterminant des difficultés du fédéralisme canadien. Par ailleurs, comme le Québec est et demeurera le principal foyer de la culture francophone au pays, notre gouvernement ne peut abandonner à d'autres la responsabilité d'assurer la sécurité et l'épanouissement d'une culture différente et largement minoritaire sur l'ensemble du continent nord-américain. Le fédéralisme canadien doit tenir compte de cette importante dimension de sa réalité, autrement il continuera d'être l'objet, au Québec, des pressions que l'on connaît. En 1967, le ministère des Affaires intergouvernementales était créé. Après quelque cinq années d'activité dans un secteur aussi vital pour la collectivité québécoise, il nous est apparu essentiel de dresser le bilan de l'ensemble de nos relations intergouvernementales. L'automne dernier, j'ai demandé au nouveau sous-ministre des Affaires intergouvernementales de faire un relevé complet des activités du ministère, autant dans le domaine des relations fédérales-provinciales que dans celui des relations avec l'extérieur. Un tel bilan ou état de la situation s'inscrit dans la perspective du style de gestion qui caractérise le gouvernement actuel et qui procède de la réalité des choses plutôt que de théories abstraites ou de simplifications abusives. Tel que nous l'avons conçu à l'origine, ce bilan des relations intergouvernementales doit se réaliser en deux phases nettement distinctes. La première, essentielle, est celle du relevé des matériaux requis et de la mise en ordre des dossiers où le Québec est engagé, soit avec le gouvernement fédéral ou avec les gouvernements des autres provinces, soit encore avec d'autres pays. Cette phase initiale qui est à être achevée nous fournira les éléments nécessaires à la seconde phase du bilan, la plus décisive et la plus déterminante pour l'avenir du Québec, celle où nous aurons à poser le diagnostic de l'état de nos relations intergouvernementales et à définir les orientations à prendre pour l'avenir. Politique linguistique. La question linguistique au Québec a donné lieu à un débat public soutenu. Les rapports entre une majorité et une minorité linguistique sont toujours très délicats. En ce sens, nous nous trouvons, au Québec, dans la même situation que celle qui existe dans tous les pays où cohabitent différents groupes linguistiques. La seule façon d'aborder une question aussi délicate, c'est avec lucidité, avec réalisme et dans un esprit de justice et d'équité. Le gouvernement actuel n'élaborera jamais une politique linguistique qui ignore la réalité culturelle, sociologique et démographique du Québec. Cette politique linguistique ne se fera pas non plus sur le dos d'un groupe ou d'un autre. Si l'on fait exception de certains incidents regrettables, le débat linguistique des dernières années a été dans son ensemble fécond et positif. Un certain consensus est même en train de se dégager autour des principes qui devraient nous guider dans la définition de notre politique linguistique. Ce qui nous amène à nous préoccuper de la question linguistique au Québec, ce sont les données de faits qui sont à la source de la situation culturelle des Québécois francophones. Parmi ces faits, les plus importants sont les suivants: — l'environnement anglophone que constitue le Canada et l'ensemble du continent nord-américain; — la très grande ouverture de la société québécoise sur cet environnement â la suite du développement exceptionnel des moyens de communication modernes et en raison de l'intimité des liens qui existent entre le Québec et le continent dans les domaines commercial, industriel et financier; — la baisse de la natalité chez les francophones et la question de l'intégration des immigrants; — la répartition, au sein de la société québécoise, du pouvoir économique entre nos deux groupes linguistiques; — l'importance numérique de la minorité anglophone au Québec et sa forte concentration dans la région de Montréal. La question linguistique au Québec doit passer du plan des principes au plan de leur application aux différents secteurs de notre vie communautaire. C'est désormais à ce niveau que doit se situer notre action. Déjà, dans plusieurs domaines, des expériences intéressantes sont en cours, que ce soit dans le cas de la directive administrative ou du règlement no 6 sur l'enseignement du français dans les écoles anglaises, de l'application de la loi 64 sur l'intégration au milieu francophone des professionnels immigrants, et le travail trop peu connu effectué jusqu'à maintenant par l'Office de la langue française et la coopération franco-québécoise au niveau des entreprises industrielles, commerciales et financières du Québec. Le gouvernement a l'intention d'agir dans d'autres domaines où nous disposons déjà d'informations suffisantes et de ressources adéquates. De même, au cours de la présente session, les membres de l'Assemblée nationale pourront prendre connaissance de différentes tranches du rapport de la commission Gendron qui nous permettront de compléter et de mieux définir la politique linguistique du Québec. Négociations syndicales. À la fin de mars dernier, M. le Président, le ministre de la Fonction publique et député de Deux-Montagnes qui fait un travail à la fois remarquable et difficile dans les disciplines, présentait à quelque 150 représentants syndicaux réunis à Québec, un important document sur les principes et les règles relatifs à la rémunération du personnel à l'emploi des institutions et organismes des secteurs public et parapublic. Ces principes furent expliqués en détail; ils ont été débattus et ils n'ont pas été contredits par les représentants syndicaux au cours des réunions de l'été dernier. À l'automne, le gouvernement déposait, aux différentes tables de négociation, le résultat de l'application de ces principes de rémunération pour les diverses catégories d'employés. Les propositions faites à chacune des tables ont été déposées dans une perspective de cohérence et d'harmonisation des salaires. Ces propositions complétaient les mesures de rationalisation prises dans ce domaine depuis quelques années. Le gouvernement estime que ses offres sont raisonnables et justes par rapport au niveau de la rémunération au Québec. Par ailleurs, la croissance des coûts dans les services publics est une situation qu'il faut normaliser si nous voulons tendre à un juste équilibre dans l'allocation des ressources publiques. Beaucoup d'autres problèmes sollicitent l'attention du gouvernement: la modification de la structure industrielle, le rajeunissement de certains secteurs manufacturiers, la stimulation des investissements, la guerre à la pauvreté et au chômage, l'aide aux défavorisés, le développement du nord, l'amélioration des communications, la lutte à la population, la valorisation de l'entreprise agricole. Une multitude de clientèles comptent donc sur les ressources de l'État; de l'harmonisation des besoins de ces clientèles dépend l'équilibre social. Le processus politique consiste, dans ces circonstances, à procéder à des arbitrages. Pour que CPS arbitrages ne conduisent pas à la désintégration sociale, il faut que les corps organisés et les groupes de pression ne drainent pas abusivement des ressources collectives au détriment des secteurs isolés de la société. Cela, nous ne le permettrons pas. En effet, il faut bien se rendre compte de l'importance des présentes négociations. Plus de 280,000 personnes sont directement touchées par la politique de rémunération du gouvernement pour les employés du secteur public et parapublic. Ces 280,000 personnes représentent quelque 12 p.c. de la main-d’œuvre totale du Québec. La masse salariale annuelle de ce personnel était, en 1971, de l'ordre de $1,800 millions pour les salaires seulement, soit environ 45 p.c. du budget des dépenses ordinaires du gouvernement. Ces seuls chiffres font comprendre toute l'importance qu'attache le gouvernement à la bonne marche des présentes négociations. C'est pourquoi nous avons tenu à définir une politique claire et précise de rémunération de notre personnel, de façon à obtenir une cohérence dans les traitements et à éviter des situations désordonnées qui entraîneraient des dépenses injustifiées et une concurrence d'autant plus absurde qu'elle s'exercerait à même les deniers publics. Sur une période de trois années, cette politique de rémunération signifie globalement et pour l'ensemble du personnel du secteur public, en vertu des propositions salariales, des engagements nouveaux de quelque $100 millions pour la première année et une infusion de quelque $270 millions au chapitre de l'accroissement de la masse salariale, si l'on prend la troisième année par rapport à la situation qui prévaut actuellement. Si nous voulons l'exprimer d'une façon un peu plus détaillée, M. le Président, si nous acceptions non pas les demandes qui sont faites par les centrales syndicales, mais une partie seulement de ces demandes, soit 5.8 au lieu de 4.8, c'est une dépense additionnelle, pour les trois années, de $120 millions que les contribuables devraient absorber. Ces quelques chiffres portent en eux-mêmes quelques évidences. L'État doit s'imposer des limites qu'il ne saurait franchir, si ce n'est aux dépens de l'ensemble de la collectivité québécoise et particulièrement au détriment de ces secteurs défavorisés de notre société qui connaissent les problèmes du chômage et qui ont besoin de l'assistance et du soutien de l'État. Bref, et c'est la position très claire du gouvernement, le Québec doit vivre selon ses moyens et le temps est venu pour tous de s'en rendre compte. L'expérience que nous vivons présentement met en évidence la nécessité qu'il y a, pour les centrales syndicales, de réévaluer en même temps que nous l'efficacité des mécanismes actuels en matière de rapports collectifs afin que l'Assemblée nationale puisse décider de nouvelles techniques qui tiendront compte de l'évolution sociale du Québec. Les menaces de chaos à chaque renouvellement de contrat collectif, dans le secteur public, ne sont pas un procédé plus acceptable aujourd'hui que les mesures individuelles de pressions indues qui ont pu s'exercer dans le passé sur les travailleurs. Étant donné l'effort collectif présenté, au cours des dernières années, dans la rémunération des employés du secteur public, il me paraît qu'actuellement les domaines les plus vitaux sur lesquels les centrales syndicales devraient faire porter leur action ne sont plus de l'ordre des salaires des employés publics mais bien plutôt de celui de la productivité et de l'efficacité des services publics. La présente ronde de négociations se fait entre les salariés du secteur public et les dirigeants d'institutions du secteur public y compris le gouvernement. Voilà bien une matière qui nous est propre et il nous appartient d'en faire une réussite. Il faudra, en effet, que nous parvenions à régler, entre nous, ce problème d'une façon raisonnable. Politique économique. La politique économique du Québec doit s'articuler autour des ressources physiques et humaines du milieu. Elle doit chercher à améliorer la position concurrentielle de nos entreprises et à réaliser un équilibre dans le développement de toutes les régions du Québec. Le secteur primaire tient une place bien réelle au Québec. On oublie trop facilement cependant les effets d'entraînement du secteur primaire sur les autres secteurs de notre économie. Si nous devons nous préoccuper d'accroître ces effets d'entraînement — et le gouvernement s'y intéresse d'une façon particulière présentement — il ne faut tout de même pas ignorer certaines réalités. Ainsi, cinq des six groupes majeurs du secteur québécois de la fabrication les plus intégrés de l'industrie secondaire sont fortement reliés à l'exploration des ressources naturelles. De même, le développement du secteur tertiaire sera d'autant plus important que les revenus du secteur primaire seront élevés. Cette interdépendance entre la mise en valeur des ressources et la progression des autres secteurs de l'économie fonde les efforts que nous faisons sur le plan des investissements dans le secteur primaire, que ce soit sur la Côte-Nord ou dans la région prometteuse de la Baie James. Les Québécois doivent être conscients qu'il se passe présentement dans le secteur agricole des événements exceptionnels. L'abandon des paroisses marginales de la Gaspésie, le regroupement des usines laitières, l'introduction de l'élevage, l'implantation des cidreries, la contestation des politiques fédérales traditionnelles, l'extension du crédit agricole sont des événements qui tiennent tous à une même volonté de modernisation et de rentabilisation. Nos efforts visent la rationalisation de nos productions en fonction de la qualité des sols et de l'orientation des marchés. Une meilleure gestion des fermes nous oblige aussi à prendre des mesures de plus en plus spécifiques pour nous assurer que la production soit à la mesure de nos marchés, qu'elle se commercialise à un prix stable et équitable pour les producteurs et se transforme ici en produits alimentaires. Nous comptons que notre politique vigoureuse fera des secteurs agricoles et agro-alimentaires, par les investissements qui vont s'y réaliser, une source nouvelle de dynamisme pour l'ensemble de l'économie québécoise. Le problème se pose en des termes différents pour les ressources forestières et minières. Si, en effet, nous pouvons alléger le fardeau des mineurs d'une exploitation en voie de fermeture, il serait insensé de se lancer dans un programme général de réouverture de vieilles mines lorsque la ressource n'y est plus. Les grands inventaires systématiques que certains préconisent, s'ils sont, de toute évidence, nécessaires n'ont, en fait, qu'une valeur bien relative. Ce qui fait la ressource, c'est aussi bien le marché que possèdent certaines sociétés que les techniques et le "management" dont elles disposent. C'est là le sens des initiatives que nous avons prises pour la mise en valeur des forêts de la Côte-Nord. Ce problème des ressources est complexe. Ainsi, nous comptons bien que les travaux de l'Assemblée nationale sur le livre blanc préparé par le ministre des Terres et Forêts nous permettront de dégager les principes sur lesquels sera fondée une politique dynamique et réaliste d'aménagement et de mise en valeur de nos ressources. La création de la Société de développement de la baie James fournira au Québec une occasion privilégiée de mettre en valeur les ressources hydrauliques de son territoire avec tout ce que cela comporte d'avantages pour l'exploitation de ses autres ressources, avec la mise en place des infrastructures que cela nécessite et avec les retombées industrielles que cela entraîne. Le gouvernement est parfaitement conscient de l'ampleur du projet de la baie James, de ses implications financières, économiques et sociales. L'attitude que nous prenons présentement témoigne de la volonté que nous avons de mener à bien ce gigantesque projet. Il a certainement le mérite de faire contraste avec l'agitation verbale et les demi-vérités auxquelles certains se livrent à partir d'informations partielles. M. le Président, le projet de la baie James est trop sérieux pour que nous nous laissions émouvoir par des arguments superficiels et intéressés. Nous convoquerons la commission parlementaire des Richesses naturelles lorsque nous jugerons utile de le faire. Les discussions qui animent nos institutions illustrent abondamment une nouvelle préoccupation des réalités économiques et une volonté collective de rattrapage. À cet égard, on peut, je crois, rendre le témoignage au présent gouvernement du Québec d'avoir contribué à sensibiliser l'opinion québécoise aux réalités économiques et à en faire la priorité qu'elle est devenue. Tout en préparant la nouvelle génération, le gouvernement québécois s'est convaincu qu'il était possible d'influencer et d'accélérer le changement dans la structure industrielle par une amélioration de l'infrastructure et par une politique vigoureuse d'aide financière à l'industrie. Afin, précisément, de rejoindre le cœur de notre problème économique, — la faiblesse de notre structure industrielle — nous avons procédé à une transformation majeure de nos conceptions d'aide à l'industrie en introduisant l'idée de sélectivité, notamment par la création de la SDI. Le programme d'action que nous entendons poursuivre et accélérer en matière industrielle porte principalement sur le développement des échanges entre nos diverses industries, sur l'accroissement du dynamisme de nos marchés internes, sur l'élargissement des marchés d'exportation et sur la productivité de nos entreprises. Une attention particulière est accordée à la recherche et à la prospection des investissements au niveau du ministère de l'Industrie et du Commerce. Nous voulons multiplier ces efforts de promotion du potentiel économique du Québec. Par ailleurs, nos infrastructures d'accueil seront améliorées encore davantage, compte tenu de nos ressources budgétaires disponibles. La question des parcs industriels est actuellement révisée afin d'en accroître le rendement. L'Assemblée nationale aura à se repencher sur ce problème. Enfin, nous améliorerons les nombreux services qui sont présentement offerts aux industries et entreprises existantes au Québec afin d'en accélérer la croissance et d'en accroître le dynamisme. En somme, le développement économique demeure, pour le gouvernement du Québec, la question prioritaire. Nous y consacrons le meilleur de nos énergies et, avec la collaboration de tous les niveaux de gouvernement, des milieux d'affaires et syndicaux, nous serons en mesure de promouvoir au Québec ces conditions de prospérité auxquelles aspire l'ensemble des travailleurs québécois. M. le Président, avec la collaboration des quatre leaders de l'Assemblée nationale, vous avez entrepris depuis près d'un an cette tâche délicate et complexe de moderniser nos méthodes et nos procédures. Je veux vous exprimer les remerciements de tous les membres de cette Assemblée pour cette initiative et formuler le vœu que cette Chambre puisse, au cours de la présente session, convenir de règlements qui protégeront les droits de la majorité et des minorités et qui accroîtront l'efficacité et surtout l'autorité de l'Assemblée nationale. La présente session sera aussi l'occasion de poursuivre les importants travaux de la réforme électorale. Le rapport de la commission permanente de la réforme des districts électoraux fera l'objet d'une étude attentive de façon que nous puissions présenter, au cours de cette session, une nouvelle loi sur la délimitation des districts électoraux québécois. De son côté, la commission parlementaire de la réforme électorale continuera les travaux entrepris selon le calendrier et le programme qu'elle s'est fixés. Projets de loi demeurés au feuilleton. À la prorogation de la dernière session, plusieurs projets de loi sont demeurés au feuilleton. Tel que convenu, nous en compléterons l'examen. Le monde agricole, celui de l'éducation, des sports et des loisirs attendent l'adoption de ces mesures gouvernementales. De même, nous comptons, au cours de la présente session, faire adopter le régime québécois d'allocations familiales, les lois des communications et des professions, ainsi que la réforme proposée aux ministères des Transports, des Travaux publics et de l'Approvisionnement. Le financement des commissions scolaires et des commissions régionales et la question des investissements des collèges et des universités retiendront aussi notre attention. Un projet de loi-cadre sur la qualité de l'environnement intégrera dans une perspective fonctionnelle les diverses initiatives gouvernementales en matière d'environnement. Dans le domaine social, des lois sur la santé mentale, la protection de la santé publique, la protection de l'enfance, le régime de rentes, la fluoration de l'eau et l'habitation familiale seront déposées. D'importantes réformes seront proposées dans le domaine municipal, en particulier en ce qui concerne l'urbanisme. Dans le domaine de la justice, la magistrature, l'assistance judiciaire, les cours municipales, la Régie des loyers et le service policier feront, entre autres, l'objet de lois. Dans le domaine économique, la loi des transports sera adoptée pour que nous puissions enfin apporter à ce secteur important de notre économie des solutions qui répondent vraiment aux besoins de l'industrie et du transport en général, et du taxi en particulier. La Loi de l'aide au développement industriel sera amendée, ainsi que la Loi des parcs industriels, afin d'accélérer le développement dynamique de nos entreprises industrielles et d'accroître l'efficacité de nos mesures d'assistance et de soutien à l'industrie. Les activités immobilières qui ont, sur l'économie du Québec, un impact important retiendront aussi notre attention. De nombreuses études ont été effectuées, ces dernières années, afin de rationaliser notre politique à l'égard de l'ensemble des institutions financières de notre milieu. À la lumière de ces travaux, l'Assemblée nationale sera appelée à adopter une loi sur les institutions financières. Le domaine des assurances, en particulier la question du contrôle que nous devons garder sur certaines institutions financières liées de très près à la croissance de l'économie québécoise seront soumis à l'attention de l'Assemblée nationale. Des lois seront également présentées afin de développer notre système de crédit agricole au niveau du crédit agricole lui-même, du prêt agricole et de la mise en valeur des exploitations agricoles. Une loi créera un crédit à la production agricole. Une société québécoise de raffinage du sucre redonnera de l'élan à cette industrie. Des mesures législatives seront proposées dans le domaine de l'administration des entreprises publiques et dans celui de la culture, en particulier la protection des biens culturels et le développement des beaux-arts. Également, des projets de loi seront présentés dans le domaine du travail. En somme, le gouvernement entend poursuivre la réalisation de son programme de gestion moderne des affaires publiques dans tous les secteurs de notre vie communautaire. M. le Président, cette Assemblée a une tâche considérable à accomplir. Je sais que tous les députés de cette Chambre y apporteront le meilleur d'eux-mêmes. Le programme législatif de la présente session, les importantes questions qui seront étudiées au niveau des commissions parlementaires, les mesures budgétaires et administratives que nous comptons prendre apporteront aux problèmes du Québec les réponses que la population attend. Quant à nous, du gouvernement, nous entendons ainsi, par le dynamisme de notre action, assumer nos responsabilités en ayant comme seul guide l'avenir du Québec, sa prospérité et son progrès. M. le Président, je propose, secondé par M. Lévesque, que l'adresse suivante soit présentée à l'honorable lieutenant-gouverneur de la province de Québec: "Nous, les membres de l'Assemblée nationale du Québec, vous remercions pour le discours d'ouverture qu'il vous a plu de prononcer."