Province Législature Session Type de discours Date du discours Locuteur Fonction du locuteur Parti politique Québec 35e 2e Discours sur le budget 25 mars 1997 M. Bernard Landry Vice-Premier ministre, ministre d’État de l’Économie et des Finances, ministre des Finances, ministre du Revenu, ministre de l’Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. PQ M. Landry : M. le Président, au cours de la dernière année, le Québec s'est engagé dans un effort sans précédent pour redéfinir ses objectifs socioéconomiques et les moyens pour les atteindre dans un cadre à la fois progressiste et rigoureux. Deux sommets nationaux couronnés de succès ont réuni les forces vives de notre nation. Entre les deux sommets, plusieurs chantiers ont conçu toute une série d'initiatives pour améliorer économiquement et socialement les vies individuelle et collective de nos compatriotes. Cet exercice extraordinaire de réflexion nous a permis de dégager les deux grandes priorités du présent budget: poursuivre l'assainissement des finances publiques et éliminer le déficit budgétaire avant l'an 2000 dans l'équité et sans compromettre notre solidarité et, en même temps et avec la même ardeur, mener la bataille pour l'emploi en rattrapant et dépassant le taux de création d'emplois du Canada d'ici trois ans. Sur le plan du redressement financier, la route est tracée et suivie. Nous étions convenus de réduire le déficit à 3 200 000 000 $ au cours de l'année qui vient de s'écouler. C'est fait. Pour la deuxième année de suite, nous atteignons la cible fixée. Depuis des années, le gouvernement était incapable de respecter ses cibles de déficit. Mon prédécesseur, le député de Crémazie, a mis fin à cette disgrâce. Le cercle vertueux est maintenant amorcé. La crédibilité nouvelle du gouvernement du Québec se consolide une année à la fois, et cela va continuer. Pour l'année qui vient, la cible maintenant consacrée dans nos lois est de 2 200 000 000 $. Avec le budget que je dépose aujourd'hui, nous maintenons le cap et nous allons ainsi franchir une autre étape cruciale en direction du déficit zéro. L'année qui commence est la plus difficile, mais c'est la dernière à requérir d'aussi grands sacrifices: nous entrerons bientôt dans des eaux plus calmes. L'objectif de cette année cependant exige des efforts importants de la part de toute la société québécoise, notamment, on le sait, des employés du gouvernement, puisque c'est d'abord par une compression des dépenses de 2 300 000 000 $ que nous l'atteindrons. Un effort particulier sera aussi demandé aux grandes entreprises. Une dernière source de réduction du déficit proviendra de la lutte contre le travail au noir et l'évasion fiscale. Sur le front de la croissance économique, nous avons observé plusieurs signes encourageants au cours des derniers mois. Les prévisions pour 1997 ne sont pas pour autant satisfaisantes, notamment en termes de création d'emplois. C'est pourquoi ce budget contient des mesures majeures pour nous rapprocher des objectifs d'emplois convenus avec nos partenaires des sommets, objectifs d'autant plus ambitieux que le Québec ne contrôle pas encore tous les leviers nécessaires à son développement. J'annonce aujourd'hui un plan d'investissements privés et publics de plus de 5 000 000 000 $. Ce budget propose en outre une réforme majeure de notre fiscalité, pour la rendre plus simple, plus compétitive, plus équitable et plus créatrice d'emplois. L'heure n'est évidemment pas venue de diminuer notablement la ponction fiscale globale. Nous allons donc faire autrement, avec plus d'efficacité économique et plus de justice sociale. Cette réforme est au départ neutre sur le plan financier, pour l'État comme pour les contribuables. Elle sera en grande partie financée par un relèvement de la taxe de vente, qui passera de 6,5 % à 7,5 % en janvier prochain. Elle comporte par ailleurs une importante diminution de l'impôt des particuliers et permettra d'alléger le fardeau fiscal global des contribuables dès que le déficit zéro sera atteint. Ils y gagneront quelque 280 000 000 $. À partir du 1er janvier prochain, la classe moyenne et les travailleurs à faibles revenus en seront les principaux bénéficiaires. J'annonce une baisse moyenne de 15 % de l'impôt sur le revenu des ménages gagnant 50 000 $ ou moins, qui s'appliquera à compter du 1er janvier prochain. J'annonce que quelque 200 000 contribuables à faibles revenus n'auront plus aucun impôt à payer. Jamais, en 25 ans, notre système fiscal n'aura été refaçonné aussi profondément. Jamais il n'aura été autant simplifié. Au total, j'annonce une réduction d'impôt sur le revenu des particuliers de 850 000 000 $. Ce budget comporte enfin un allégement des taxes sur la masse salariale, une série d'actions pour aider les jeunes à prendre leur place dans la société et un appui au développement des divers secteurs tels que l'économie sociale, la forêt, les mines, l'habitation sociale et les communautés rurales. L'an dernier, la croissance de l'économie québécoise a été de 1,2 %. Cela se compare bien à celle du Canada qui a été de 1,5 %, surtout si l'on considère l'austérité de notre dernier budget. Malgré l'augmentation des investissements et la croissance des exportations, la création nette d'emplois en 1996 n'aura été que de 8 500, ce qui constitue une grande déception. J'utilise l'expression «création nette» parce qu'il s'est créé bien plus d'emplois en 1996, mais qu'il en est aussi disparu beaucoup. Le résultat est que le taux de chômage en 1996 s'est établi à 11,8 %, ce qui demeure inacceptable, bien que ce soit une amélioration notable par rapport au triste résultat de 13,2 % atteint en 1993. Ce taux de chômage de 11,8 % est supérieur au taux canadien dans des proportions similaires à ce qui prévaut depuis 40 ans. Le différentiel relatif entre le Canada et le Québec est donc structurel. C'est la raison pour laquelle seuls des efforts majeurs, structurels eux aussi, pourront le combler. Sur le plan de la conjoncture économique, on note toutefois, depuis quelque temps, une amélioration sensible. Les taux d'intérêt ont beaucoup diminué au cours des deux dernières années. Cette diminution commence à porter fruit. D'ailleurs, grâce à sa gestion serrée, le gouvernement du Québec emprunte aussi plus facilement et à bien meilleur compte. Depuis plusieurs mois, de nombreux indicateurs économiques progressent rapidement et généralement plus vite au Québec qu'au Canada. C'est le cas des ventes d'automobiles et des ventes au détail. Le marché de la revente d'habitations a aussi rebondi de façon spectaculaire. Les livraisons du secteur manufacturier se sont accrues fortement. Depuis mars 1996, les exportations internationales du Québec ont fait un bond spectaculaire de près de 18 % contre 7,4 % pour le Canada. Cette amélioration de la conjoncture se répercute sur le marché du travail. Depuis juillet, il s'est créé quelque 64 000 emplois au Québec, dont près de la moitié durant les trois derniers mois. Cela représente la majorité des emplois créés au Canada depuis juillet dernier. Les investissements des entreprises sont une condition essentielle à la prospérité économique. Combien de fois n'a-t-on pas entendu dire l'an dernier, par des esprits chagrins et de moroses gazettes, que les investisseurs boudaient le Québec au profit d'autres régions du Canada. La réalité leur a donné tort. Que s'est-il passé vraiment en 1996? Les nouvelles données de Statistique Canada nous le disent. Les entreprises privées ont accru de 12,6 % leurs investissements au Québec dans l'expansion de leurs installations et dans la modernisation de leur équipement. En soi, cette augmentation, la plus forte depuis la fin des années quatre-vingt, est remarquable. Mais ce qui l'est plus encore, c'est que cette hausse était trois fois plus forte qu'au Canada. Elle a également dépassé, et par une forte marge, l'augmentation de 7,8 % dont l'Ontario a bénéficié. Par ailleurs, on lit et on entend régulièrement que le Québec recevrait moins de 10 % des investissements étrangers au Canada. Ces données ne concernent en fait que les acquisitions de compagnies canadiennes par des entreprises étrangères. Notre objectif à nous, c'est d'attirer au Québec l'investissement direct étranger qui crée des emplois. C'est ce qui s'est produit l'an passé: les firmes étrangères ont annoncé au cours de 1996 des investissements de 2 500 000 000 $ au Québec, le tout fortement concentré dans les technologies de l'avenir. Il est clair que ces décideurs étrangers font confiance au Québec et qu'ils contribuent à la force de son économie. C'est d'ailleurs une des bonnes années de notre histoire économique pour ce type d'investissement. La récente étude réalisée par Price Waterhouse le confirme: notre structure fiscale est compétitive pour attirer ces investissements, particulièrement pour les entreprises qui font de la recherche-développement. Les conditions d'un redressement graduel et durable de l'économie sont donc en place. Cette hausse marquée de plusieurs indicateurs économiques montre que le processus est solidement amorcé. Il devrait se poursuivre, étant donné le faible niveau des taux d'intérêt et la conjoncture favorable qui dure et perdure aux États-Unis d'Amérique, notre plus grand marché extérieur. Malheureusement, les contraintes que nous impose le lourd endettement des ménages et des gouvernements nous entraveront encore en 1997. Elles tendront à freiner notre croissance dans l'année qui vient. Le passé pèse lourd. Si nos finances avaient été redressées avant, nous pourrions mieux profiter de la portance, de la conjoncture actuelle. À partir de 1998, cependant, les perspectives s'annoncent plus favorables. Au fur et à mesure que les contraintes héritées du passé seront levées, nous pourrons encaisser les dividendes de l'élimination du déficit. Je dois ajouter que, comme l'an dernier, ce budget a été élaboré à partir de prévisions économiques très prudentes. Par exemple, notre hypothèse d'une croissance de 1,5 % pour 1997 est inférieure à celles de tous les experts du secteur privé. Les hypothèses de création d'emplois qui ont servi à préparer le présent budget n'en prévoient que 25 000. Encore une fois, c'est plus modeste que ce qu'anticipent les experts de tout le secteur privé. Mais, de toute manière, les mesures annoncées aujourd'hui, l'action globale du gouvernement et de ses partenaires se conjugueront pour que cette prévision conservatrice soit largement dépassée. En effet, au sommet économique de Montréal, en novembre dernier, nous nous sommes tous collectivement donné l'objectif, d'ici trois ans, de créer proportionnellement autant, sinon plus, d'emplois au Québec qu'au Canada. Le mouvement est bien amorcé. Il faut l'accélérer. Ce budget propose donc une stratégie concrète pour faciliter le démarrage de 5 300 000 000 $ de nouveaux investissements créateurs d'emplois au cours des 18 prochains mois. Cette stratégie repose d'abord et avant tout sur le déclenchement de 4 200 000 000 $ d'investissements privés, véritable moteur de la croissance économique. Pour ce faire, le gouvernement mettra en place le train de mesures suivant: création d'un Fonds pour l'accroissement de l'investissement privé et la relance de l'emploi, le FAIRE; renforcement des dispositions fiscales favorisant l'investissement privé; partenariat avec les sociétés d'État pour la réalisation de projets du secteur privé; appui massif à des investissements en environnement. Ces mesures viennent s'ajouter aux instruments déjà mis en place lors du Sommet de Montréal. J'annonce donc aujourd'hui la création du Fonds pour l'accroissement de l'investissement privé et la relance de l'emploi, le FAIRE – F-A-I-R-E – qui permettra de soutenir des projets pour une valeur totale de 2 200 000 000 $. Ce fonds vise prioritairement les projets de plus de 25 000 000 $, notamment dans le secteur manufacturier, les technologies de l'information et le tourisme. L'aide gouvernementale prendra différentes formes: garanties de prêts, prise en charge des intérêts, aide à la formation de la main-d’œuvre. Un exemple des projets visés est l'accélération du virage stratégique de l'industrie des pâtes et papiers vers la fabrication de produits à plus haute valeur ajoutée. Plusieurs de ces projets d'envergure sont déjà sur les planches à dessin. J'annonce que le fonds disposera d'une enveloppe prédéterminée de 250 000 000 $. Il ne pourra plus accepter de projets après les 18 prochains mois. C'est une invitation au secteur privé à faire vite et bien. En matière d'investissements et d'incitations fiscales, j'annonce que tout nouvel investissement manufacturier réalisé au Québec d'ici au 31 décembre 1998 bénéficiera d'un congé de taxe sur le capital pour une période de deux ans et d'un amortissement accéléré égal à 125 % de la dépense engagée. Et, puisque les petites et moyennes entreprises demeurent, comme au temps de l'énoncé de politique «Bâtir le Québec», les principales créatrices d'emplois, j'annonce que toutes les PME nouvellement crées jouiront d'un congé fiscal total de cinq ans. Elles ne paieront ni la taxe sur le capital, ni l'impôt sur les profits, ni les cotisations au Fonds des services de santé pendant les cinq premières années de leur existence. Pour leur part, les sociétés d'État déploieront des efforts accrus pour favoriser le démarrage de nouveaux projets en partenariat avec le secteur privé. Il s'agit d'utiliser nos sociétés d'État comme un levier pour inciter les entreprises privées à investir chez nous. Les dispositions fiscales que j'ai déjà mentionnées et les partenariats des sociétés d'État devraient engendrer un minimum de 1 300 000 000 $ d'investissements industriels nouveaux. On trouvera le détail de ces mesures à l'annexe sur les mesures fiscales et budgétaires, qui fait partie intégrante du présent discours. Par exemple, l'association actuelle de la Société générale de financement avec Noranda et des partenaires japonais dans le projet Magnola pourrait aboutir prochainement à la construction d'une usine de magnésium de taille mondiale à Asbestos. On parle d'un investissement de plus de 500 000 000 $. D'autres partenariats de la Société générale de financement pourraient se concrétiser rapidement dans les secteurs de la transformation de l'aluminium, des semi-conducteurs, de la pétrochimie et de l'industrie pharmaceutique. Je suis d'ailleurs persuadé que la nouvelle direction de la SGF, dont tous saluent la grande compétence, saura animer de façon déterminante les synergies nécessaires au sein du groupe des sociétés d'État. D'autres projets à valeur ajoutée sont bien avancés chez REXFOR dans la transformation du bois et dans le secteur du papier. L'alliance récente entre Hydro-Québec et Noverco permettra d'appuyer la mission continentale d'Hydro-Québec et favorisera l'expansion du réseau gazier au Québec. À ce propos, il faut espérer que tous appuieront, autant que notre gouvernement, le projet de Gaz Métropolitain de raccorder le gisement gazier de l'île de Sable en Nouvelle-Écosse au réseau canadien, via le Nouveau-Brunswick et le Québec. Cette ambitieuse initiative pourrait se traduire par des investissements majeurs au Québec. Les entreprises agricoles, pour leur part, auront aussi à consentir des investissements importants dans les prochaines années. Nous entendons soutenir l'effort d'adaptation que leur imposent à la fois les contraintes environnementales et les exigences des nouveaux marchés. L'industrie agroalimentaire contribue pour près de 10 % à la production intérieure au Québec et procure de l'emploi à plus de 370 000 personnes. Mais la cohabitation des agriculteurs avec les autres citoyens des milieux agricoles est parfois problématique. Il n'est pas convenable que le Québec ne soit pas en harmonie avec la puissante agriculture qui contribue tant à sa prospérité et qui lui permet d'occuper de façon équilibrée et humaine son vaste domaine rural. Les femmes et les hommes du monde agricole méritent notre respect et notre appui. On sait que les producteurs agricoles investissent déjà dans la protection de l'environnement et la réduction des nuisances. Il faut les aider à aller plus loin en leur facilitant l'accès à de nouvelles méthodes, par exemple celle développée par le Centre de recherche industrielle du Québec. Afin de faciliter à nos agriculteurs la poursuite de l'adaptation de leur entreprise, j'annonce un programme d'aide à l'investissement dans les structures d'entreposage et les équipements de traitement des déchets organiques. Ce programme sera mis en œuvre concurremment à l'entrée en vigueur de la loi n° 23 sur le droit de produire et du règlement sur la pollution d'origine agricole. Pour s'y conformer, les agriculteurs devront réaliser des investissements de plus de 500 000 000 $ sur cinq ans. L'aide gouvernementale devrait permettre que près de 200 000 000 $ soient investis au cours des deux prochaines années. C'est évidemment grâce au travail concerté de mes collègues de l'Agriculture et de l'Environnement que ces initiatives furent rendues possibles. Dans le domaine industriel, le lourd héritage d'activités passées requiert des investissements auxquels l'aide de l'État est indispensable. De nombreux terrains contaminés forment aujourd'hui de véritables trous noirs dans le tissu urbain et paralysent le développement économique des villes. Montréal et Québec ont particulièrement besoin de notre appui à cet égard. J'annonce donc un nouveau programme d'aide financière qui permettra la réhabilitation de terrains contaminés dans les villes de Montréal et de Québec. Ce programme sera financé en parts égales par le gouvernement et les villes concernées. Il permettra de réaliser des investissements de 32 000 000 $ au cours des deux prochaines années. Toujours pour des raisons de protection du milieu ambiant, j'annonce aujourd'hui l'abolition de la taxe de 0,082 $ sur le litre de propane. Ainsi le mettrons-nous sur le même pied que le gaz naturel et l'éthanol utilisés pour la propulsion des véhicules. Tout en réduisant la pollution, nous aurons favorisé l'industrie québécoise de fabrication de réservoirs de propane. Nous disposons actuellement de deux leviers importants mis au point lors du Sommet de Montréal pour attirer une nouvelle clientèle industrielle au Québec: le Fonds de développement industriel et la disponibilité d'un bloc réservé de 500 MW de puissance énergétique. Au cours des deux prochaines années, on prévoit susciter un minimum de 500 000 000 $ d'investissements privés, notamment dans les segments à haute valeur ajoutée de l'électrométallurgie et de l'électrochimie. Le secteur public contribuera lui aussi à la création d'emplois. Il le fera en assurant la réalisation, dès cette année et l'an prochain, de plusieurs projets prioritaires pour la satisfaction des besoins de la population québécoise. J'annonce donc de nouveaux investissements publics pour un total de 763 000 000 $ au cours des deux prochaines années. Nous investirons 305 000 000 $ dans la transformation du réseau de la santé et des services sociaux qui se trouve en pleine restructuration et adopte de nouvelles façons de dispenser les soins à la population. Ces investissements sont une autre étape dans la réalisation de cette réforme majeure dont l'architecte, le député de Charlesbourg, mérite toute notre admiration. Nous consacrerons 150 000 000 $ à améliorer la capacité du réseau de fournir des soins de première ligne à la population. Ces investissements permettront l'agrandissement ou la relocalisation de plusieurs établissements. Ils permettront également d'y ajouter l'équipement requis pour diminuer la durée d'hospitalisation ou, le cas échéant, éviter l'hospitalisation elle-même. Nous allouerons 124 000 000 $ aux équipements de soins de longue durée. Ces investissements serviront, entre autres, à reconvertir les immeubles libérés par la transformation du réseau afin qu'ils puissent accueillir la clientèle de longue durée, principalement les personnes âgées. Il existe également des besoins importants dans les établissements dispensant des services d'adaptation sociale pour jeunes ou adultes en difficulté. Nous consacrerons 31 000 000 $ à en ouvrir plus largement l'accès. Dans l'éducation, j'annonce que nous investirons 348 000 000 $ pour répondre aux nouveaux besoins nés, entre autres, de la réforme de l'éducation et de la politique familiale. La ministre responsable est en train de mettre en place cette dernière politique. Les ajustements envisagés sont présentés en annexe au présent discours. Il faudra construire de nouvelles écoles ou agrandir des écoles existantes pour tenir compte de l'augmentation de clientèle prévue principalement en maternelle, naturellement. Quelque 103 000 000 $ seront consacrés à ces investissements. Nous allouerons 64 000 000 $ pour transformer et aménager des locaux ainsi que moderniser des ateliers pour répondre aux nouvelles exigences des programmes dans le domaine de la formation professionnelle. Par ailleurs, une rénovation des écoles de l'île de Montréal est essentielle pour qu'elles continuent d'accueillir adéquatement la clientèle qui les fréquente. Nous y investirons 25 000 000 $. Enfin, dans le réseau des cégeps et celui des universités, nous investirons 150 000 000 $ dans la rénovation d'édifices afin qu'ils accueillent les étudiants dans des locaux plus propices à l'apprentissage. De plus, je suis heureux d'annoncer des investissements nouveaux dans la culture totalisant quelque 53 000 000 $ pour des projets d'équipements culturels structurants ainsi que la restauration d'édifices patrimoniaux. Le métro de Montréal constitue un patrimoine immobilier majeur et rentable pour la métropole. Les 26 premières stations ont toutefois 30 ans déjà. Si nous n'agissons pas pour empêcher la détérioration de ce patrimoine, la qualité du service pourrait être affectée. Les usagers en souffriraient, ainsi que l'environnement urbain si crucial à la sécurité et à l'harmonie dans la ville. J'annonce donc que 57 000 000 $ seront investis en deux ans dans des rénovations majeures. Nous paierons la moitié de cette somme, stimulant ainsi l'emploi au cœur de Montréal. Un autre patrimoine essentiel qui se détériore vite, si on ne l'entretient pas, c'est le réseau routier. Pour le maintenir en état, nous devons accroître le niveau de nos investissements. C'est pourquoi j'annonce aujourd'hui un plan d'investissement visant à relever, sur une période de trois ans, le niveau des budgets pour le réseau routier. Les investissements routiers seront ainsi augmentés progressivement pour atteindre 638 000 000 $ en 1999-2000. J'annonce que, dès cette année, nous les porterons à 515 000 000 $, une augmentation de 155 000 000 $ par rapport aux investissements prévus au livre des crédits déposé la semaine dernière. L'an prochain, ces investissements atteindront 574 000 000 $, une augmentation de 214 000 000 $. Les automobilistes et les transporteurs en seront les premiers bénéficiaires, et c'est pourquoi mon collègue des Transports et moi-même leur demanderons d'y contribuer par le biais d'une hausse des droits d'immatriculation de 28 $ par véhicule. Ces droits seront majorés pour les véhicules de luxe, conformément aux recommandations de la Commission sur la fiscalité. La majoration s'appliquera aux véhicules valant plus de 40 000 $ et correspondra à 1 % de la valeur excédant ce montant. Par ailleurs, conscient que le réseau autoroutier reste à compléter, notre gouvernement est disposé à examiner des propositions de partenariat avec le secteur privé pour son expansion et son exploitation. Ce budget, je l'ai dit, propose une réforme majeure de notre fiscalité. La fiscalité a des impacts déterminants sur la croissance économique et la création d'emplois. La Commission sur la fiscalité et le financement des services publics a abondamment démontré la nécessité de rendre la nôtre plus simple, plus compétitive et plus équitable. Je tiens à souligner ici le travail immense effectué par M. Alban D'Amours, président de la Commission, qui a bien servi le Québec en compagnie des femmes et des hommes qui l'ont assisté. Leur travail est d'autant plus remarquable qu'ils ont produit un rapport unanime malgré les divers horizons d'idées d'où ils provenaient. Un niveau trop élevé d'impôt sur le revenu nuit à la création d'emplois, les particuliers et les entreprises préférant limiter leurs efforts productifs ou les déployer dans des régions où ces efforts sont moins taxés. Il y a donc un danger d'appauvrissement collectif et individuel lié à un trop lourd fardeau pour ceux et celles qui travaillent. Le Québec est déjà dans la zone rouge à ce chapitre. L'impôt sur le revenu des particuliers au Québec est aujourd'hui surutilisé dans notre fiscalité. Le poids de l'impôt sur le revenu des particuliers est le plus élevé au Canada. Il dépasse même le niveau atteint dans tous les pays du Groupe des Sept. Un tel niveau de prélèvement fiscal mine notre compétitivité et sape progressivement notre capacité de maintenir la justice sociale. La réforme de la fiscalité que j'annonce aujourd'hui s'articule largement autour de recommandations de la Commission sur la fiscalité, à savoir: rendre la fiscalité plus favorable à l'emploi; réduire le fardeau fiscal global des contribuables dès que nous aurons atteint l'objectif du déficit zéro; rechercher une plus grande équité entre les contribuables; simplifier l'impôt et son administration; et améliorer la situation des travailleurs à faibles revenus. Cette réforme majeure de la fiscalité des particuliers et les modifications à la taxe de vente du Québec se traduiront dans trois ans par un gain net global de 280 000 000 $ pour les contribuables. À court terme, la réforme est neutre pour les équilibres financiers du gouvernement. Le premier volet de cette importante réforme consiste, je l'ai dit, en une réduction de 850 000 000 $ de l'impôt sur le revenu des particuliers à compter du 1er janvier 1998. Cette réduction permettra: d'abaisser de 15 % l'impôt des ménages gagnant 50 000 $ ou moins; de réduire de 3 % l'impôt de ceux gagnant plus de 50 000 $; d'éliminer totalement l'impôt à payer pour 200 000 contribuables à faibles revenus; d'améliorer aussi substantiellement l'aide fiscale en faveur des travailleurs à faibles revenus; et de simplifier, enfin, considérablement l'application de la fiscalité pour quatre contribuables sur cinq. Il s'agit d'une réduction importante de l'impôt. Elle profitera principalement aux contribuables de la classe moyenne tout en augmentant le revenu disponible des ménages les plus démunis. Le régime d'imposition des particuliers s'avère, comme on le sait, beaucoup trop complexe. Certains nous ont même suggéré que le format d'une carte postale devrait pouvoir suffire à remplir une déclaration de revenus. Sans aller jusque-là, la réforme que j'annonce aujourd'hui permet une énorme simplification: la déclaration de revenus de 80 % des contribuables tiendra désormais en seulement deux pages. Ces deux petites pages, recto verso, pourront même inclure la déclaration des deux conjoints à la fois, s'ils le souhaitent. En même temps, le régime fiscal deviendra plus équitable pour la vaste majorité des contribuables, sans toutefois accroître les taux supérieurs d'imposition. À cette fin, nous introduirons une nouvelle disposition fiscale destinée à favoriser spécifiquement les contribuables qui utilisent peu les divers crédits d'impôt et les déductions. Ils pourront désormais se prévaloir d'un nouveau montant forfaitaire s'élevant à 2 350 $ par contribuable. Ce nouveau montant remplacera plusieurs des crédits d'impôt et déductions offerts dans le régime général. Il bénéficiera particulièrement aux ménages à plus faibles revenus. Les contribuables qui, eux, par ailleurs, utilisent intensément les différents crédits d'impôt et déductions pourront continuer à se prévaloir du régime général et des dispositions actuellement en vigueur. Chaque contribuable pourra ainsi exercer son choix entre le régime général ou le régime simplifié, suivant sa situation personnelle. De plus, afin d'améliorer l'équité fiscale dans le traitement des conjoints, ce nouveau montant pourra, si les deux le désirent, être transféré d'un conjoint à l'autre lorsqu'il ne peut servir à réduire l'impôt de l'un des conjoints. Un élément majeur de la réforme de la fiscalité des particuliers consiste à simplifier la table d'imposition. Le régime actuel comporte cinq taux d'imposition, auxquels s'ajoutent deux surtaxes et une réduction d'impôt. À compter du 1er janvier prochain, ces dispositions complexes seront remplacées par une nouvelle table d'imposition qui ne comportera que trois taux. Le taux marginal supérieur d'imposition, d'ailleurs, diminuera légèrement à 26 %. De plus, afin d'améliorer la progressivité de notre régime fiscal, les crédits d'impôt, qui sont actuellement établis selon un taux de 20 %, le seront en fonction d'un taux de 23 %, à l'avantage des contribuables. La réforme améliore aussi fortement le régime fiscal des travailleurs à faibles revenus. Pour les assister autant que possible dans leur démarche d'intégration au marché du travail, nous augmenterons à 26 000 $ le niveau de revenu familial à partir duquel l'aide fiscale aux ménages à faibles revenus commence à être réduite. Nous réglons ainsi un problème lancinant que notre fiscalité traîne depuis des décennies. L'aide fiscale accordée aux ménages gagnant moins de 26 000 $ s'en trouvera considérablement accrue: 35 000 000 $ serviront à bonifier le remboursement d'impôts fonciers; 23 000 000 $ viendront bonifier l'aide aux familles à bas revenus à l'égard des frais de garde que leur occasionne le fait de travailler. Notre gouvernement entend également soutenir la démarche des personnes handicapées qui désirent participer comme les autres au marché du travail. Nous injecterons 19 000 000 $ par an dans le régime fiscal pour qu'il reconnaisse une plus grande partie des dépenses qu'entraîne leur handicap. Au total, la réforme de l'impôt sur le revenu des particuliers bénéficiera à tous les contribuables et particulièrement à ceux de la classe moyenne. Il s'agit d'un juste retour des choses, considérant que ces contribuables furent durement sollicités ces dernières années. Afin d'illustrer ces impacts positifs pour la classe moyenne, prenons à titre d'exemple des ménages dont le revenu est de 30 000 $. Un couple ayant deux enfants et disposant de deux revenus bénéficiera d'un gain de 1 296 $, alors qu'une famille monoparentale ayant un enfant profitera d'une hausse de son revenu disponible de 1 510 $. Les personnes seules profiteront également de ces importants allégements alloués à la classe moyenne. Par exemple, une personne seule de moins de 65 ans verra son revenu disponible s'accroître de 465 $. Une personne âgée de 65 ans ou plus bénéficiera d'un gain total de 1 144 $. La réforme permettra également aux ménages à faibles revenus d'améliorer leur situation. Une famille ayant deux enfants et un revenu de 20 000 $ profitera d'une hausse de revenu disponible de 458 $. Une famille monoparentale gagnant un peu plus que le salaire minimum, soit 15 000 $, bénéficiera d'un gain de 550 $. Les gains apportés par cette réforme compléteront l'importante entreprise de soutien financier aux familles qu'a lancée le premier ministre et dont est responsable ma collègue de l'Éducation, la politique familiale. Dans les deux cas, notre action sera particulièrement bénéfique aux nombreuses femmes chefs de famille monoparentale, qui méritent particulièrement notre respect et notre appui. La réforme rendra également notre fiscalité plus compétitive par rapport à celle de nos voisins et partenaires commerciaux. En réduisant les impôts sur le revenu, elle permettra un allégement des coûts de production des entreprises. Elle favorisera également l'investissement en contribuant à attirer au Québec les travailleurs spécialisés qui sont nécessaires à la prospérité ou en incitant ceux que le Québec forme chaque année à y demeurer. Par exemple, un couple ayant deux enfants et dont le revenu total est de 80 000 $ bénéficiera d'une baisse d'impôts atteignant 1 012 $. Une personne seule disposant de ce même revenu profitera de son côté d'une hausse de revenu disponible de 363 $. Et je vais déposer, M. le Président, ce tableau montrant l'impact sur le revenu disponible des contribuables de la réforme de l'impôt sur le revenu des particuliers. Dans le contexte actuel des finances publiques du Québec, cette vaste réforme de l'impôt sur le revenu des particuliers ne peut se concevoir sans un financement alternatif, là où la compétitivité fiscale le permet. À l'exception de l'Alberta, le Québec est actuellement l'endroit au Canada, le seul, où le taux de taxe de vente est le plus bas. Le taux de la taxe de vente sera donc porté, comme je l'ai dit, de 6,5 % à 7,5 % le 1er janvier 1998, soit au moment même de l'entrée en vigueur de la réforme de l'impôt des particuliers. L'annonce de cette mesure avec un préavis de neuf mois pourra même avoir un effet stimulant, non récurrent, sur les ventes au détail au cours de 1997 en incitant les consommateurs à devancer l'achat des biens importants. Ce déplacement du fardeau fiscal vers la taxe de vente permettra au Québec de mieux contrer l'impact des réductions d'impôt sur le revenu annoncées en Ontario et accroîtra la compétitivité de notre économie. En effet, le poids de l'impôt sur le revenu tend à alourdir les coûts de main-d’œuvre des entreprises. La taxe de vente est beaucoup moins dommageable pour l'économie, puisqu'elle est soustraite du prix des produits exportés. Le Québec, comme on le sait, est une puissante exportatrice. Elle est aussi plus respectueuse de la liberté des choix des contribuables, qui utilisent leur revenu disponible comme bon leur semble, pour l'épargne ou pour la consommation. Ce rééquilibrage de notre système fiscal est conforme à notre stratégie budgétaire qui consiste à éliminer le déficit avant de réduire globalement les impôts et taxes. Le relèvement du taux de la taxe de vente permet en effet d'autofinancer entièrement la réforme de l'impôt sur le revenu des particuliers au cours des deux prochaines années. L'année suivante, le déficit zéro sera atteint. La réforme se traduira alors pour les contribuables par une baisse nette de leur fardeau fiscal global de l'ordre de 288 000 000 $. C'est ainsi qu'en 1999-2000 les Québécoises et les Québécois pourront profiter encore davantage de la gestion rigoureuse de leurs finances publiques et recueillir les fruits de tous leurs efforts et sacrifices. J'ai voulu que ce déplacement de fardeau fiscal ne se fasse pas au détriment des ménages à faibles revenus. C'est pourquoi j'annonce une augmentation substantielle du crédit d'impôt pour taxe de vente, qui sera à la fois plus généreux et accessible à un plus grand nombre de contribuables. Cette hausse du crédit pour taxe de vente, conjuguée aux mesures que je décrivais précédemment concernant l'aide fiscale aux ménages à faibles revenus, injectera 265 000 000 $ de plus dans cet instrument de redistribution, dont le coût total sera ainsi porté à 515 000 000 $ en 1998. Grâce à cette mesure importante, la totalité de la taxe additionnelle qui découlera de la hausse du taux de la taxe de vente sera remboursée à tous les ménages à faibles revenus. Mieux encore, cette bonification du crédit d'impôt pour taxe de vente fera complètement disparaître le fardeau de cette taxe pour les personnes dont le revenu est inférieur à 10 000 $. Ainsi, pour la première fois depuis la mise en place de la taxe de vente au détail, en 1940, les personnes qui comptent parmi les moins nantis de notre société seront complètement exemptées du fardeau de la taxe de vente. Il s'agit là d'une amélioration majeure de notre régime fiscal et de son degré de progressivité. En outre, ce crédit d'impôt fera dorénavant l'objet chaque année de deux versements par chèque. Actuellement, les prestataires de la sécurité du revenu ne sont pas imposables: ils ne le deviendront pas davantage. Ceux et celles qui vivent uniquement de ces prestations n'auront, pas plus qu'aujourd'hui, à payer d'impôt. Toutefois, un contribuable qui, dans une année, reçoit à la fois des revenus de l'aide sociale et d'autres revenus qui le portent globalement au seuil d'imposition se trouve présentement avantagé indûment. Le fait que la portion de son revenu provenant de l'aide de dernier recours soit soustraite au fisc crée une situation injuste par rapport aux autres contribuables. À compter du 1er janvier prochain, les prestations de sécurité du revenu reçues par ceux qui ont d'autres sources de revenus imposables seront donc comptées dans le revenu total, comme l'a proposé ma collègue, la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité, dans son projet de réforme de la sécurité du revenu. Chaque emploi nouveau est précieux. C'est pourquoi j'annonce en outre que nous rembourserons 1 200 $ de taxes sur la masse salariale pour chaque emploi nouveau. Ainsi, toute entreprise pourra obtenir des remboursements allant jusqu'à 36 000 $ si elle crée 30 emplois dans l'année. Cela représente une bonification substantielle de l'allégement des taxes sur la masse salariale annoncé en décembre dernier. Cette mesure vise à stimuler la création d'emplois stables et à plein temps, décourager l'usage du temps supplémentaire et la précarisation du travail, encourager la réduction volontaire et le partage du temps de travail. Cette mesure permettra à de nombreuses entreprises qui créent des emplois au Québec de payer des taxes sur la masse salariale plus basses qu'en Ontario, pour l'année au cours de laquelle elles créent ces emplois. Au salaire minimum, cela équivaut à une abolition totale des taxes québécoises sur la masse salariale pour les emplois nouvellement créés. J'ai annoncé une stratégie visant le démarrage de plus de 5 000 000 000 $ d'investissements. Je viens aussi d'annoncer une réforme qui simplifie le régime fiscal, accroît son équité et améliore la compétitivité de l'économie québécoise. Nous répondons là sans conteste aux attentes des partenaires du Sommet sur l'économie et l'emploi envers leur gouvernement en matière d'économie, mais aussi de justice. Ils nous ont dit qu'il fallait agir sur des éléments structurels afin de positionner avantageusement le Québec pour le virage des années 2000. À cet effet, ils nous ont demandé d'agir sur la réglementation, la conquête des marchés, la place à faire aux jeunes, le développement de l'économie sociale et des communautés rurales. Nos partenaires nous ont rappelé que les entreprises évoluent dans un environnement réglementaire qui nuit à leur compétitivité et à la création d'emplois. Notre gouvernement s'est engagé à moderniser la réglementation et élaguer celle qui est inutile. Il peut aujourd'hui présenter fièrement son bilan et les actions qu'il s'apprête à prendre. Je rends publique aujourd'hui la liste de près de 120 mesures d'allégements réglementaires qui résultent de notre effort de mobilisation des ministères et organismes. Tel que promis au Sommet sur l'économie et l'emploi, les décrets tenant lieu de conventions collectives sont actuellement réexaminés. Des projets de règlement sur l'abrogation des décrets dans les secteurs du bois ouvré et du verre plat viennent d'être publiés. Mon collègue, le ministre du Travail, procédera d'ici la fin de juin prochain à la révision prioritaire des décrets du vêtement, du meuble et des services automobiles. Par ailleurs, afin de faciliter le démarrage des entreprises et de simplifier leurs échanges avec le gouvernement du Québec, je propose qu'à compter du 1er janvier 1998 chaque entreprise soit dotée d'un numéro unique valide dans les ministères et organismes. La tracasserie administrative des multiples numéros d'identification, qui n'a plus sa raison d'être avec la technologie actuelle, sera alors éliminée. L'économie du Québec, on le sait, est très ouverte vers l'extérieur. Néanmoins, par rapport à d'autres économies occidentales, trop peu de PME exportent leurs produits. Notre objectif, que j'ai énoncé l'an dernier, est d'augmenter de 2 000 le nombre des PME exportatrices d'ici l'an 2000. Depuis juin 1996, plus de 650 entreprises ont déjà manifesté un intérêt nouveau pour l'exportation. Ce budget propose d'augmenter de près de 30 % l'appui financier du gouvernement à l'exportation pour nous rapprocher encore plus rapidement de la cible. Notre gouvernement entend offrir un service individualisé aux PME localisées à l'extérieur des grands centres et intéressées par les marchés de l'exportation. De plus, il mettra à la disposition des entreprises un système d'information commerciale performant et efficace. Par ailleurs, l'an dernier, nous avons remplacé une partie de notre réseau de délégations à l'étranger par diverses formes de représentations désignées sous le nom d'antennes à l'étranger, en collaboration, d'ailleurs, avec mon collègue des Relations internationales et des partenaires québécois, privés ou publics. Outre les délégations qui ont été maintenues et le nouveau bureau de Munich, le Québec est désormais assuré d'une présence dans 14 villes, outre ce qui avait été maintenu. Ces villes sont: Atlanta, Boston, Chicago et Los Angeles, aux États-Unis d'Amérique; Bogota, Buenos Aires et Santiago du Chili, en Amérique du Sud; Bangkok, Beijing, Hanoi, Jakarta, Kuala Lumpur et Taipei, en Asie; et Milan, en Europe. Les résultats préliminaires encourageants de cette formule incitent à poursuivre dans cette voie pour que nos entreprises puissent profiter des grands marchés développés et des marchés en émergence. Dans un premier temps, nous établirons d'autres antennes à Séoul et Manille. Nous envisageons ensuite d'en ouvrir à Barcelone ainsi que dans d'autres villes en Asie, en Amérique latine, en Europe de l'Est et au Moyen-Orient. Nous multiplierons également les missions commerciales et nous comptons aussi profiter de l'appui de nos dirigeants d'entreprises et de nos chefs de file qui accepteront, sur une base volontaire, de contribuer à la promotion, dans leurs réseaux respectifs, des investissements au Québec et à la croissance de nos exportations. Cette année, notre gouvernement organisera un nombre record de 150 missions commerciales. Pour leur contribution jusqu'à ce jour à nos ventes à l'étranger, je remercie particulièrement mes collègues des Relations internationales, des Ressources naturelles, la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce ainsi que les députés de Berthier, de Johnson et de Marguerite-D'Youville, et d'autres. Deux de ces missions, une en Chine à l'automne et l'autre en Amérique latine en 1998, seront dirigées par le premier ministre lui-même, qui ne ménage et n'a ménagé aucun effort pour promouvoir notre commerce extérieur. L'économie du Québec ne peut se priver du dynamisme, de l'imagination et des talents de sa jeunesse. Nous voulons donc que nos jeunes puissent briser le cercle vicieux du «pas d'expérience, pas d'emploi» et puissent prendre leur place sur le marché du travail. Ce budget augmentera de plus de 30 000 000 $ au cours des trois prochaines années les sommes consacrées à la création d'emplois d'été pour les jeunes dans les entreprises et au gouvernement. J'annonce l'injection de 21 000 000 $ au cours des trois prochaines années pour aider financièrement les entreprises à embaucher des étudiants stagiaires. En versant aux employeurs une subvention au salaire pour des emplois d'été, nous aiderons des étudiants et des étudiantes en formation professionnelle au secondaire et aux niveaux collégial et universitaire à acquérir une expérience de travail dans leur domaine d'études. Seront admissibles les entreprises et les organismes sans but lucratif des secteurs de l'agriculture, des forêts, des mines, de la culture, des communications ainsi que du secteur manufacturier, du recyclage et des services aux entreprises. J'annonce, de plus, que nous doublerons les sommes consacrées l'an dernier à l'embauche d'étudiants au gouvernement durant l'été. Nous y affecterons plus de 10 000 000 $ au cours des trois prochaines années. Au total, avec ces deux dispositions, quelque 20 000 jeunes pourront obtenir cet été un emploi en passant par Placement étudiant du Québec. C'est une augmentation de 50 % par rapport à l'an dernier. Former adéquatement les jeunes contribuera à résoudre le problème qu'éprouvent certaines entreprises à combler leurs besoins en main-d’œuvre hautement spécialisée. J'annonce à cet effet l'octroi d'un montant de 10 000 000 $ pour des formations et des stages, notamment dans les secteurs des technologies de l'information et de l'aérospatiale. Notre action favorisera l'adaptation des compétences de jeunes diplômés aux besoins spécifiques des entreprises de ces secteurs. Quand on veut apporter des solutions concrètes au problème du chômage, on doit bien comprendre que le taux persistant de 11,8 % de chômage n'est pas uniformément réparti dans la société. Il varie beaucoup selon les niveaux de scolarité et de formation, qui demeurent des facteurs déterminants. Avec un diplôme universitaire, le taux de chômage tombe de moitié. À l'inverse, les travailleurs qui ont moins de neuf années de scolarité connaissent un taux de chômage de près de 18 %. Le taux de chômage varie beaucoup aussi en fonction du secteur d'activité. En 1996, il atteignait 20 % dans le secteur des mines et de la forêt pendant qu'il était à peine de 6,4 % dans les transports et les communications. Dans ce dernier secteur, le gouvernement du Québec, en partenariat avec l'École de technologie supérieure et l'Institut national de recherche scientifique et avec l'appui de grandes entreprises comme Téléglobe, compte mettre sur pied un Centre international de formation en télécommunications. Ce centre formera sur une plus grande échelle la main-d’œuvre hautement qualifiée que requiert la nouvelle économie. Ce budget propose aussi la création de milieux fertiles à la transmission du savoir et de la culture de certaines entreprises à des jeunes Québécoises et à des jeunes Québécois. J'annonce donc la création de centres de développement des technologies de l'information chargés d'appuyer des entreprises œuvrant dans des secteurs d'activité en émergence. Ces entreprises de ces secteurs bénéficieront d'un congé fiscal de cinq ans de taxe sur le capital, d'impôt sur les profits et de cotisations au Fonds des services de santé. Elles auront droit aussi à un crédit d'impôt pour l'acquisition de matériel spécialisé. Il leur sera cependant demandé d'exercer leurs activités à l'intérieur d'édifices spécialement désignés à cette fin. Pour que des jeunes puissent bénéficier de la présence de ces entreprises au Québec, je propose un crédit d'impôt égal à 40 % des salaires versés par ces entreprises à des jeunes de 18 à 35 ans. Sur le plan fiscal aussi, notre gouvernement entend améliorer l'arrimage entre la formation et le marché du travail. Au niveau de l'école, j'annonce donc que le crédit d'impôt pour stages en milieu de travail sera doublement élargi. Il sera étendu aux entreprises qui accueillent des apprentis du nouveau régime d'apprentissage annoncé au Sommet de Montréal sur l'économie et l'emploi ou des étudiants adultes inscrits au secondaire dans les services d'insertion socioprofessionnelle. Pour mieux appuyer fiscalement les jeunes qui préparent leur avenir par des études plus poussées, j'annonce en outre que les frais de scolarité admissibles au crédit d'impôt qui ne seront pas utilisés dans une année pourront l'être au cours des années subséquentes. La notion de frais de scolarité sera élargie pour inclure tous les frais afférents demandés par les universités et les collèges. Notre gouvernement, sous l'inspiration de mon collège des Affaires municipales, vient d'adopter un plan d'action en habitation sociale. Ce plan contribuera de diverses façons à la relance de l'emploi dès cette année. Au total, le présent budget engage près de 100 000 000 $ supplémentaires dans plusieurs mesures d'habitation sociale qui aussi seront créatrices d'emplois. Tout d'abord, pour donner suite aux engagements du Sommet sur l'économie et l'emploi à l'égard de l'économie sociale, nous mettrons sur pied le Fonds québécois du logement social. Avec les 43 000 000 $ que nous y injecterons à chaque année, nous pourrons rendre disponibles annuellement: 1 200 logements pour des ménages à faibles revenus; 500 logements pour des personnes âgées en perte d'autonomie; et 120 logements pour des personnes ayant des besoins particuliers, comme les femmes victimes de violence, les individus atteints d'une déficience intellectuelle ainsi que les itinérants. Par ailleurs, nous investirons 30 000 000 $ de la part du gouvernement et au moins 20 000 000 $ en provenance des municipalités, pour un total de 50 000 000 $, pour la rénovation de logements et la revitalisation de quartiers dans les zones urbaines et rurales; 5 000 000 $ additionnels au Programme d'aide à l'adaptation de domicile pour les personnes handicapées; 3 000 000 $ à l'adaptation de logements pour les aînés en perte d'autonomie; et 1 300 000 $ pour des projets spécifiques issus du milieu et pour les organismes de représentation et de défense du droit des citoyens en matière de logement. De plus, nous créons une allocation-logement unifiée et élargie à laquelle auront droit non seulement les bénéficiaires actuels, mais aussi près de 28 000 ménages additionnels. Grâce à cette réforme, 106 000 familles verront leur aide au logement augmentée. Le Sommet sur l'économie et l'emploi a mis en évidence le potentiel important de création d'emplois dans le secteur de l'économie sociale et la nécessité de nous doter des moyens d'en faire une composante à part entière de l'économie. J'ai le plaisir d'annoncer aujourd'hui un soutien financier spécifique à trois projets de création d'emplois soumis par le Groupe de travail sur l'économie sociale, que dirigeait Mme Nancy Neamtan. Ces projets créeront plus de 7 000 emplois sur trois ans. Le premier est un programme d'exonération financière à l'attention des ménages qui ont recours aux services d'aide domestique à domicile offerts par des entreprises de l'économie sociale. L'aide accordée sera versée directement à l'organisme qui dispense le service. Ainsi, la personne admissible ne déboursera que la différence entre le tarif exigé par l'organisme et le montant de l'aide accordée. Ce programme coûtera 79 000 000 $ au cours des trois prochaines années et créera 6 000 emplois. Le second projet permettra la création de 1 050 emplois sur trois ans pour les personnes handicapées dans les centres de travail adapté. Des fonds de 7 500 000 $ seront alloués à cette fin à l'Office des personnes handicapées du Québec. Enfin, nous contribuerons à un fonds d'accompagnement des entreprises et organismes œuvrant dans le secteur de l'économie sociale. Des crédits de 4 000 000 $ sur trois ans seront attribués à ce fonds, le secteur privé ayant au préalable apporté une contribution équivalente. Notre gouvernement est très sensible, on le sait, à la vitalité et au dynamisme des communautés rurales. C'est dans ce contexte que j'annonçais, lors du dernier Discours sur le budget, la mise sur pied d'un groupe de travail sur les villages prospères pour identifier les caractéristiques des milieux ruraux qui connaissent du succès dans le développement de leur communauté. Ce groupe de travail a conclu que, si l'engagement de la communauté constitue effectivement l'ingrédient essentiel au succès de son développement, l'État se doit d'appuyer cette prise en charge. Mon collègue, le ministre responsable du Développement des régions, déploie des efforts inlassables dans ces domaines. Ses moyens seront augmentés. J'annonce donc aujourd'hui qu'un montant de 6 000 000 $ sur trois ans sera consacré au financement de mesures de soutien spécifiques aux milieux ruraux. Une partie de ce montant sera accordée à Solidarité rurale du Québec, qui a accepté de conseiller le gouvernement en matière de développement rural. Par ailleurs, le Fonds conjoncturel de développement sera pourvu d'une enveloppe supplémentaire de 3 000 000 $ sur trois ans. Est-il nécessaire de réitérer l'attachement historique de l'État du Québec au soutien de la culture? Une malhabile et récente contestation de cette évidence a permis de mettre en lumière le rôle prépondérant de l'action du Québec en matière de culture. C'est normal et c'est vital aussi. De Georges-Émile Lapalme à la députée de Chambly, plusieurs hommes et femmes de qualité ont appuyé de toutes leurs forces et de celles de l'État l'effort des artistes qui sont la conscience et l'âme de notre peuple. Je redis d'une autre manière ce que j'ai dit l'an dernier: un peuple sans culture est un peuple pauvre, quel que soit le niveau de sa richesse matérielle. Notre gouvernement continuera donc d'apporter un soutien majeur à l'industrie culturelle québécoise qui contribue si magnifiquement à notre spécificité. Ce budget annonce, d'une part, deux assouplissements à la déduction pour frais de divertissement de nature culturelle. Je rappelle que, depuis l'an dernier, ces frais sont déductibles à 100 %, plutôt qu'à 50 %, dans le calcul du revenu imposable des entreprises. J'annonce aujourd'hui que dorénavant les abonnements à des spectacles de chanson seront aussi déductibles à 100 %, tout comme les abonnements à des concerts ou à des spectacles d'opéra, de théâtre ou de danse. De plus, lorsqu'une entreprise achète la totalité des billets d'une représentation culturelle, cet achat sera dorénavant déductible à 100 %, tout comme s'il s'agissait d'un abonnement. Par ce budget, notre gouvernement désire, d'autre part, favoriser une plus grande diffusion d'un produit culturel toujours capital: le livre. Encore aujourd'hui, malgré le potentiel exceptionnel que nous annoncent les nouvelles technologies, l'accès à la connaissance et aux compétences passe d'abord par le livre. C'est vrai également pour la maîtrise de la langue. Les spécialistes ont depuis longtemps établi un lien explicite entre la lecture et la capacité de maîtriser une langue. La vitalité du français au Québec suppose donc aussi que les Québécoises et les Québécois aient la possibilité d'entretenir un contact direct et régulier avec les livres. C'est pourquoi notre gouvernement souhaite participer à la redynamisation de nos bibliothèques publiques. Elles ont en effet un important rattrapage à effectuer, notamment pour renouveler leurs collections de livres. J'annonce donc aujourd'hui que notre gouvernement entend construire à Montréal, dans un court délai, une grande bibliothèque de prêt ouverte au grand public. Nous parlons ici d'un projet de l'ordre de 75 000 000 $, dont notre premier ministre fait une priorité personnelle. J'annonce aussi que nous faisons passer de 10 000 000 $ à 15 000 000 $ par année les sommes prévues au Programme de soutien aux bibliothèques publiques pour l'acquisition de livres. Ce programme fonctionnant en appariement avec les municipalités, il s'agit d'une injection supplémentaire de 10 000 000 $ par an dans l'acquisition de livres pour toutes les bibliothèques publiques du Québec. L'industrie touristique est une industrie hautement créatrice d'emplois. C'est pourquoi il est important de contribuer à la qualité et à la compétitivité du produit touristique québécois par de nouveaux investissements. À cette fin, le congé de taxe sur le capital annoncé précédemment sera aussi applicable aux investissements de cette industrie. La ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce, responsable du Tourisme, a déjà annoncé une refonte majeure de la réglementation dans ce secteur, de façon à alléger les contrôles et favoriser l'autoréglementation. Cette réforme fut accueillie avec enthousiasme et saluée par l'industrie. C'est à l'industrie qu'il appartient de se prendre en main et de garantir la qualité du produit touristique québécois. Nous lui avons donc demandé de se doter d'un programme de certification de la qualité des établissements. Afin d'appuyer l'industrie dans cette tâche, j'annonce que nous lui accorderons un budget de 1 000 000 $ par an au cours des trois prochaines années. Parmi les attraits touristiques du Québec, les grands espaces viennent au premier rang. Or, la région du Grand Nord québécois est la seule qui ne possède pas encore d'association touristique régionale. Ce budget débloque les fonds nécessaires pour combler cette absence. Qu'on me permette ici de rendre hommage à M. Henri Jamet, qui oeuvrait au service de l'État lors de l'accident d'avion fatal survenu en avril dernier dans ce Grand Nord qu'il a tant aimé et contribué à faire connaître. Deux secteurs clés de notre économie, soit la forêt et les mines, sont particulièrement créateurs d'emplois dans les régions. En plus de diverses incitations fiscales spécifiques que le présent budget vient bonifier, mon collègue des Ressources naturelles disposera de budgets de 130 000 000 $ sur trois ans pour la forêt et les mines, qui seront affectés dans les quatre domaines suivants: la mise en valeur des ressources en forêt; la création d'emplois en forêt pour les bénéficiaires de la sécurité du revenu; des mesures d'appui à l'entrepreneurship et aux promoteurs pour accélérer la mise au point et la fabrication de produits forestiers à forte valeur ajoutée; et un nouveau programme pour le développement de l'industrie minière. Enfin, selon diverses études bien connues, l'épargne des Québécoises et des Québécois ne serait pas réinvestie au Québec dans des proportions convenables. Nous croyons que, dans ce domaine, la transparence s'impose. Je prendrai donc des dispositions pour que la population puisse connaître la répartition des portefeuilles de placements des organismes des secteurs public et parapublic. Par ailleurs, le gouvernement n'entend pas intervenir de façon autoritaire dans un univers où la fluidité doit prévaloir, surtout quand on sait que le Québec est un importateur net de capitaux. Cependant, il faudra peut-être envisager diverses mesures incitatives afin de favoriser la croissance de l'industrie de la gestion de portefeuille au Québec. Le député de Crémazie m'aide de son expérience et de ses conseils en cette matière. Il est temps maintenant, M. le Président, d'aborder une autre priorité de notre gouvernement: le redressement des finances publiques. Lors du Discours sur le budget du 9 mai dernier, nous nous sommes engagés à suivre un plan financier d'élimination du déficit budgétaire. La séquence des cibles de déficit est maintenant bien connue: 3 200 000 000 $ en 1996-1997; 2 200 000 000 $ cette année; 1 200 000 000 $ l'an prochain; et, finalement, zéro en 1999-2000. Ces objectifs ont d'ailleurs été inscrits dans la Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire, adoptée à l'unanimité par cette Assemblée en décembre dernier. J'ai annoncé que notre cible de 1996-1997 était atteinte. Pour une deuxième année consécutive également, nous avons réduit les dépenses de programmes en valeur absolue. Deux années de suite, c'est une première dans l'histoire du Québec moderne. Saluons ici cette performance remarquable qu'ont réalisée au Conseil du trésor la députée de Taillon et le député de Labelle. Je dépose, M. le Président, le tableau suivant qui représente les résultats préliminaires des opérations financières du gouvernement pour 1995-1996 et 1996-1997. Ce qu'il y a de plus encourageant dans ces résultats, c'est que nous avons parcouru la moitié du chemin sur la voie du déficit zéro. Nous avons hérité d'un déficit de près de 6 000 000 000 $; nous venons de le réduire pratiquement de moitié, à 3 200 000 000 $. Le redressement des finances publiques du Québec se bute toutefois à un obstacle de taille: la volonté du gouvernement fédéral de faire assumer par le Québec et les autres provinces le fardeau de la réduction de son déficit. Après deux décennies de laxisme budgétaire, le gouvernement du Canada a entrepris d'assainir ses finances publiques. Louable objectif. Mais il faut s'interroger maintenant sur les moyens utilisés. Depuis 1993, la moitié des réductions de dépenses du gouvernement fédéral ont été faites en sabrant les transferts aux provinces. La moitié. Pour le Québec, les coupes dans les programmes sociaux annoncées dans les budgets de mon collègue fédéral se sont traduites par un manque à gagner de 800 000 000 $ au cours de l'année qui vient de s'écouler. L'an prochain, le manque à gagner atteindra 1 400 000 000 $. En fait, ces coupes représentent 60 % des réductions de dépenses que nous devons faire cette année. Quand on connaît les sacrifices imposés à nos employés par ces coupes, on mesure l'ampleur du délestage fédéral. Et le plus choquant dans tout cela, c'est que les économies réalisées par Ottawa servent à financer de nouvelles intrusions fédérales dans les champs de compétence du Québec. Parmi les empiétements fédéraux annoncés en février dernier, mentionnons la nutrition prénatale, l'alphabétisation, les interventions auprès des enfants et des personnes handicapées, les infrastructures de recherche dans les universités et les hôpitaux, la mise sur pied d'un système d'information en santé, et j'en passe. Plutôt que d'intervenir ainsi dans nos champs de responsabilité, le gouvernement fédéral devrait donner suite à la demande formulée à maintes reprises par le Québec: il devrait se retirer du financement des programmes sociaux et transférer au Québec, en contrepartie, des points d'impôt sur le revenu des particuliers, respectant en cela l'esprit et la lettre de la Constitution canadienne. J'aimerais maintenant prendre quelques minutes pour parler de l'harmonisation de la taxe de vente du Québec avec la TPS fédérale. On se rappellera qu'en 1992 le Québec a été un pionnier en matière d'harmonisation de sa taxe de vente avec la TPS fédérale. C'était une bonne décision, prise en particulier par notre regretté collègue Gérard D. Levesque. Cette décision permettait d'augmenter la compétitivité de nos entreprises sur les marchés et de réduire le coût de leurs investissements. Le Québec n'a rien reçu du gouvernement fédéral pour compenser les pertes de revenus découlant de l'harmonisation. En fait, pour que cette réforme soit neutre sur ses revenus, le gouvernement québécois a dû augmenter les taux de taxation des entreprises. Par la suite, trois provinces maritimes ont décidé d'harmoniser, à compter du 1er avril prochain, leurs taxes de vente avec la TPS fédérale. Dans leur cas, Ottawa leur versera, pour quatre ans, une compensation de près de 1 000 000 000 $. Ces trois provinces se seront donné, avec l'argent fédéral provenant en partie de nos impôts, un régime fiscal plus compétitif: elles vont réduire le taux de leur taxe de vente; elle vont donner à leurs entreprises des remboursements complets de la taxe de vente payée sur leurs achats; elles n'auront pas à augmenter les impôts de leurs entreprises pour financer leur réforme; et elles se seront donné ces avantages en les faisant payer par nos propres impôts. En plus, elles font de la publicité dans les journaux du Québec pour attirer nos entreprises chez elles. Le Québec a dénoncé dès sa mise en œuvre le programme fédéral d'aide à l'harmonisation. Toutefois, le respect le plus élémentaire de l'équité exige d'Ottawa qu'à défaut de retirer son aide aux Maritimes il consente une aide équivalente à toute province qui aura choisi d'harmoniser sa taxe de vente avec la TPS. Le Québec demande donc à ce titre une compensation de 2 000 000 000 $, soit un montant nettement inférieur à ce qu'obtiendront, par habitant, les provinces de l'Atlantique. Malgré l'évidence des coûts qu'a entraînés pour le Québec l'harmonisation, Ottawa refuse de traiter le Québec d'une façon juste et équitable. Lors du Sommet de Montréal, notre gouvernement a reçu l'appui de nos principaux partenaires socioéconomiques dans ses démarches de recouvrement de ce qui lui est dû. Nous allons continuer la bataille, et j'espère que l'opposition officielle, après étude soignée des chiffres, appuiera sans équivoque la position du Québec, comme l'ont fait l'Ontario, l'Alberta et la Colombie-Britannique. Pour l'année qui vient, conformément à l'orientation que nous avons suivie jusqu'à maintenant, j'annonce que l'objectif de déficit de 2 200 000 000 $ sera respecté. Et je dépose, M. le Président, ces tableaux qui présentent les prévisions des équilibres financiers du gouvernement pour 1997-1998. Nous atteindrons notre objectif de déficit principalement par la réduction des dépenses. La semaine dernière, mon collègue le président du Conseil du trésor a présenté les crédits pour la prochaine année financière. L'effort de réduction des dépenses en 1997-1998 atteindra 2 300 000 000 $. Un effort particulier sera demandé aux grandes entreprises. Lors du dernier budget, j'avais fixé au 31 mars prochain la date à laquelle les grandes entreprises pourraient commencer à recevoir un remboursement complet de la taxe de vente du Québec payée sur leurs achats. Actuellement, certains de leurs achats ne donnent pas droit au remboursement de la taxe de vente. Afin que tous participent à nos efforts pour éliminer le déficit et après avoir soigneusement examiné la situation, j'en suis venu à la conclusion que nous n'avons pas les moyens, à ce moment-ci, d'appliquer cette mesure qui aurait coûté plus de 500 000 000 $ au trésor québécois cette année. Si, par ailleurs, Ottawa décidait de nous verser notre juste compensation pour l'harmonisation avec la TPS, je reviendrais immédiatement sur cette décision. Au terme de leurs consultations, les membres de la Commission sur la fiscalité et le financement des services publics ont été clairs sur la question du travail au noir et de l'évasion fiscale. Ils ont écrit: «...les citoyens souhaitent que le gouvernement s'attaque vigoureusement et rapidement à ce problème avant que les conséquences ne soient irréversibles». Voilà des propos on ne peut plus clairs. Depuis deux ans, notre gouvernement a entrepris une série d'actions dans ce domaine. Avec le présent budget, nous accélérons le pas: nous effectuons un blitz du côté du travail au noir dans l'industrie de la construction; nous régularisons la situation des travailleurs à pourboires et améliorons du même coup leur protection sociale; nous accentuons les efforts de perception des revenus déjà entrepris. Ces actions devraient engendrer des revenus additionnels de 326 000 000 $ en 1997-1998, en percevant simplement ce qui nous est dû. Pour enrayer le travail au noir et l'évasion fiscale dans la construction, qui demeure l'industrie la plus affectée par ces problèmes, ce budget propose des mesures qui comportent trois volets: intensifier les mesures mises en œuvre au cours des dernières années; améliorer les mécanismes de contrôle; intégrer les activités de la Régie du bâtiment et de la Commission de la construction. Maintenant, dans un autre domaine, la sous-déclaration des revenus de pourboires dans l'hôtellerie et la restauration est un problème généralisé que les gouvernements ont négligé. Seulement 5 % des pourboires sont déclarés, ce qui occasionne des pertes fiscales de 115 000 000 $. Cette situation porte préjudice non seulement aux revenus du gouvernement, mais aussi aux employés eux-mêmes. En effet, ceux-ci ne bénéficient de l'assurance-emploi que sur la partie de leurs pourboires qui est contrôlée par leur employeur. Certains nous proposent, vous le savez, de rendre obligatoire le pourboire, pour mettre fin de façon radicale à cette situation doublement antisociale. Nous avons retenu une approche plus modérée, préconisée d'ailleurs par de nombreux acteurs du milieu de la restauration. Cette nouvelle approche devrait servir à la fois les employés, les employeurs, les finances publiques et le civisme fiscal. Tout d'abord, nous ferons en sorte que les travailleurs de la restauration et de l'hôtellerie puissent bénéficier des mêmes avantages sociaux que les autres travailleurs. À cette fin, notre gouvernement exigera qu'une entente écrite, négociée entre employeur et employés dans chaque établissement, fasse partie intégrante du contrat de travail de ces employés. Cette entente précisera les modalités de remise des pourboires du salarié à l'employeur, le taux de prélèvement pour les retenues à la source sur ces pourboires et les modalités de redistribution des pourboires aux employés. Le gouvernement fédéral nous a annoncé que cette entente garantira enfin aux employés l'assurance-emploi sur leurs pourboires. Par ailleurs, les employeurs seront tenus, à compter du 1er janvier prochain, d'effectuer les retenues à la source sur un montant équivalant à 8 % des ventes sujettes à pourboires effectuées par l'employé, si celui-ci lui remet une somme inférieure à ce montant. Les dispositions existantes des régimes québécois de prestations sociales, tels que le régime de rentes et le régime de prestations aux accidentés du travail, garantissent déjà à ces employés les bénéfices correspondant aux revenus de pourboires qu'ils déclareront. De cette manière, les travailleurs seront incités à déclarer tous leurs pourboires. En raison de ces changements, les employeurs seront amenés à verser des cotisations sociales sur la totalité des pourboires. Pour les aider à s'adapter à cette nouvelle situation, le présent budget leur accorde un crédit d'impôt égal aux cotisations additionnelles qui en résulteront. Certains groupes criminalisés ont des comportements très violents qui mettent en danger la vie et la sécurité des honnêtes gens. Notre gouvernement et mes collègues, les ministres de la Justice et de la Sécurité publique, n'ont et n'auront aucune indulgence à cet égard. D'ailleurs, le gouvernement est intervenu avec vigueur par des opérations policières spéciales, dont les escouades Carcajou et GRICO. Ces opérations seront poursuivies. Mais nous frapperons aussi d'une autre manière les groupes criminalisés, sans violence aucune, en leur point qui traditionnellement leur fait très mal: leurs ressources financières clandestines. Nous intensifierons notre lutte contre le commerce illégal d'alcool, une source importante de revenus pour le crime organisé. Par exemple, les détenteurs de permis d'alcool verront leurs permis de vente suspendus pour un minimum de 30 jours s'ils se rendent coupables de vente d'alcool de contrebande ou d'exploitation de jeux illégaux. La diminution de la contrebande d'alcool et l'augmentation correspondante des ventes légales de boissons seront profitables au trésor public, il est vrai, mais les travailleurs de l'industrie des spiritueux et leurs patrons, qui nous pressent d'agir depuis longtemps, s'en trouveront aussi gagnants. Plusieurs services produits ou subventionnés par le gouvernement sont surtout d'intérêt local. Ils seraient probablement mieux gérés s'ils étaient produits par des instances locales, y compris les municipalités régionales de comté, les MRC, comme on dit, et les communautés urbaines. Cela devrait favoriser la mise en place de services et de façons de faire mieux adaptés aux désirs des populations et assurer un meilleur contrôle des coûts par les citoyens. Par ailleurs, les instances locales ont eu l'occasion, au cours des derniers mois, de nous faire part d'un certain nombre de leurs problèmes. On pense entre autres aux difficultés des villes-centres, dont le fardeau fiscal est particulièrement élevé, à l'étalement urbain et au poids excessif de la rémunération dans les dépenses des municipalités. En ce qui concerne la ville de Montréal, je tiens à souligner que nos discussions pour un pacte fiscal vont bon train et que nous pourrons annoncer d'ici quelques semaines les décisions de notre gouvernement. Nous entendons procéder à un réaménagement de la fiscalité locale et confier aux instances locales des responsabilités accrues. Ces responsabilités ont trait, entre autres, à la planification et au financement des services et équipements locaux et régionaux. Ce réaménagement devra respecter les principes d'autonomie locale, de subsidiarité et d'équité dans le partage des coûts et des services. Les instances locales seront amenées à rationaliser leurs activités, à réduire leurs coûts de fonctionnement et à dégager les sommes nécessaires dans le but de ne pas alourdir le fardeau fiscal des contribuables locaux. Elles devront inévitablement réexaminer les coûts de leur main-d’œuvre. En effet, l'importance de ces coûts dans leur budget de fonctionnement et l'écart parfois considérable en faveur des employés municipaux entre leur rémunération globale et celle du personnel des secteurs public et privé commandent un tel examen. À cet égard, le gouvernement entend favoriser des échanges soutenus avec les autorités municipales et leurs associations de salariés afin qu'ensemble et, le cas échéant, avec l'aide du gouvernement elles puissent trouver des solutions appropriées à ce problème réel. L'équité et les impératifs de saines finances publiques imposent une obligation de résultat à tous les intéressés. De plus, nous sommes déterminés à accélérer la mise en place de la politique de consolidation des communautés relative aux agglomérations de plus de 10 000 habitants. Pour que les instances locales puissent assumer adéquatement leurs nouvelles responsabilités, d'autres moyens devront être envisagés. Les parties concernées auront le temps d'en discuter, puisque cette réforme de la fiscalité locale n'entrera en vigueur qu'à compter du 1er janvier 1998. Les budgets des municipalités pour 1997 ne seront donc nullement affectés. La réforme devra entraîner pour le gouvernement des économies budgétaires de 125 000 000 $ pour l'exercice 1997-1998 et de 500 000 000 $ pour l'exercice suivant. Le cadre financier est donc ferme, mais toutes les modalités peuvent être discutées et le seront dans le respect de nos interlocuteurs des collectivités locales. Mon collègue le ministère des Affaires municipales déposera bientôt un document d'orientation présentant le contexte général de la réforme proposée, les enjeux et les mesures envisagées. Il y sera prévu une démarche de consultation au cours de laquelle les élus locaux et la population en général pourront largement exprimer leurs points de vue. Par ailleurs, on se rappellera que le gouvernement du Québec s'était engagé, en février 1994, dans une politique de réduction des taxes sur les produits du tabac de concert avec le gouvernement fédéral. Ce dernier avait réduit sa taxe de 10 $ par cartouche de 200 cigarettes, tandis que le Québec avait réduit la sienne de 11 $. En mai 1995, nous avons récupéré 0,72 $ de ce dollar supplémentaire. À compter de minuit ce soir, nous récupérerons les 0,28 $ restants. En conclusion, M. le Président, j'insiste pour dire à quel point j'ai cherché dans ce budget à allier le plus possible, comme trait de gouvernement, les vertus d'audace, de détermination et de ténacité que requièrent des circonstances particulièrement difficiles. Ce budget est un plan d'action exigeant qui a mobilisé tout l'appareil public. Il a été rendu possible grâce au dévouement des grands serviteurs de l'État, des hommes et des femmes qui ont donné le meilleur d'eux-mêmes pour nous seconder dans son élaboration. J'aimerais remercier aussi les membres du caucus des députés ministériels pour leurs suggestions pertinentes qui ont contribué à enrichir le contenu de ce budget. Je voudrais exprimer toute ma gratitude, enfin, au premier ministre et à mes collègues du Conseil des ministres, qui n'ont jamais cessé d'afficher un parti pris pour les réformes, pour l'action et contre l'immobilisme et le laisser-aller. De cela, l'ensemble du gouvernement peut être fier. C'est un budget qui s'attaque aux vrais problèmes que vit le Québec, qui améliore notre compétitivité sans sacrifier nos idéaux de solidarité. C'est un budget qui met de l'ordre, qui prépare l'avenir et qui rehausse la crédibilité de notre État. Tous ces travaux, longs et difficiles, sont une autre façon d'aimer notre patrie. Ce voyage vers la santé économique et financière recoupe parfaitement le cheminement vers notre destin national. C'est pourquoi je dis enfin, reprenant le vers immortel de Gaston Miron, qu'en préparant ce budget avec mes excellentes équipes «je n'ai jamais voyagé vers autre pays que toi mon pays». Je propose donc, M. le Président, que l'Assemblée nationale approuve la politique budgétaire du gouvernement. Merci à l'Assemblée et à vous tous et toutes, chers collègues.