Province Législature Session Type de discours Date du discours Locuteur Fonction du locuteur Parti politique Québec 34e 2e Discours sur le budget 20 mai 1993 M. Gérard D. Levesque Ministre des Finances PLQ M. Levesque : M. le Président, j'ai l'honneur aujourd'hui de présenter un neuvième exposé budgétaire à cette Assemblée et à la population du Québec. Je n'étonnerai donc personne en affirmant que ce budget est présenté sous le signe du respect des engagements et des orientations fondamentales de notre gouvernement. Tous savent aussi que nous sommes confrontés à des problèmes nouveaux et qu'il nous a fallu employer une approche novatrice pour y faire face. Nous avons eu l'occasion de procéder à une consultation intensive avant de fixer nos choix en matière de politique fiscale et budgétaire. Ainsi, la commission parlementaire du budget et de l'administration a tenu en février dernier des audiences publiques sur cette question. Elle y a examiné 79 mémoires de groupes et de personnes intéressés à l'avenir des finances publiques du Québec ainsi qu'un document de consultation présenté par le gouvernement et intitulé «Les finances publiques du Québec: Vivre selon nos moyens». À cette consultation publique se sont ajoutés de nombreux entretiens privés avec les députés et les membres du Conseil des ministres. J'ai aussi eu l'occasion de rencontrer des représentants de plusieurs groupes socioéconomiques et d'échanger avec les citoyens de mon comté, de ma région et de tous les coins du Québec. Cet exercice de consultation s'est avéré extrêmement bénéfique. Il aura été pour moi et pour mes collègues l'occasion de constater encore une fois la volonté des Québécois de s'attaquer résolument aux problèmes auxquels ils font face. Il nous aura de plus permis de mieux identifier les attentes et de prendre ainsi des décisions d'autant plus conformes aux aspirations de tous. Nous sommes à l'aube d'une nouvelle période d'expansion économique. Mais le ralentissement que nous avons subi a finalement été trop long et il a laissé des marques aussi bien au plan des finances publiques que sur le marché du travail et dans les bilans des entreprises. Devant une telle situation, d'aucuns auraient pu être tentés par la voie la plus facile, celle de l'inaction, qui se traduirait par une lente détérioration des perspectives d'avenir de notre société. Nous avons plutôt choisi d'affronter les problèmes, convaincus que telle était la volonté de nos concitoyens. Nous avons fait le choix de tout mettre en œuvre pour améliorer notre avenir et celui de nos enfants. Nous pourrons ainsi leur offrir un niveau et une qualité de vie qui continuent de s'élever, tout comme l'ont fait nos prédécesseurs avant nous. Au cours des trois dernières années, l'évolution de l'économie a emprunté une trajectoire inédite. On se rappellera qu'au printemps de 1990 les économies canadienne et québécoise sont entrées en récession. La glissade s'arrêtait un an plus tard, la production ayant reculé de 2,9 % au Québec et de 3,6 % au Canada. Malheureusement, après deux ans de reprise, l'économie canadienne vient tout juste de rattraper les niveaux de production d'avant la récession, ce qui peut être attribué à deux grands facteurs. D'une part, des grands pays comme l'Allemagne et le Japon sont actuellement en récession, alors qu'aux États-Unis, notre principal partenaire commercial, la reprise économique a été, jusqu'à récemment, relativement lente. D'autre part, sur le plan intérieur, l'endettement élevé des ménages et des entreprises les amène à restreindre leurs dépenses de consommation et d'investissement. Il ne faudrait pas, cependant, que la lenteur inhabituelle de la reprise nous fasse oublier les signes tangibles d'accélération qu'on a pu observer depuis l'été dernier à l'échelle nord-américaine. Aux États-Unis, la production a augmenté au rythme moyen de 3,3 % au cours des trois derniers trimestres. Au Canada, les derniers indicateurs permettent de croire qu'au premier trimestre de 1993 la croissance approchera le rythme de 3,5 % déjà observé au trimestre précédent. À la forte progression des exportations notée depuis plusieurs mois déjà, au Québec comme au Canada, s'est ajouté un regain de vigueur des dépenses des consommateurs. De plus, le contexte d'ensemble est également favorable à la poursuite de ce mouvement d'accélération. Les tensions inflationnistes ont disparu depuis bientôt deux ans, rendant possible la réduction marquée des taux d'intérêt. Le dollar canadien a reculé, ce qui, avec la consolidation de l'expansion américaine, ne manquera pas d'alimenter la croissance de nos exportations. En outre, la remontée de l'emploi s'est amorcée, ce qui contribuera au renforcement de la confiance des ménages et à une reprise durable des dépenses de consommation comme de l'ensemble de l'économie. Je prévois donc une croissance de la production de 2,6 % au Québec en 1993, une performance qui devrait continuer de s'améliorer en 1994. Quant à la création d'emplois, elle est aujourd'hui prévue à 23000 pour l'année en cours et à 50 000 pour l'année qui vient. La récession que nous avons connue ainsi que la lenteur de la reprise ne sont pas sans influencer négativement la situation des finances publiques. Les équilibres financiers du gouvernement en 1992-1993 ont été affectés par la faiblesse de la reprise de l'économie. C'est ainsi que le déficit devrait atteindre 4 978 000 000 $ en 1992-1993, en hausse de 1 188 000 000 $ par rapport aux prévisions du dernier Discours sur le budget. Cette révision à la hausse du déficit est attribuable essentiellement à la révision à la baisse de 1 436 000 000 $ des revenus budgétaires par rapport aux prévisions du dernier Discours sur le budget. Les revenus autonomes ont été plus faibles de 1 365 000 000 $. La conjoncture économique défavorable de 1991 qui a continué d'affecter sérieusement les impôts des sociétés en 1992-1993, la croissance économique inférieure aux prévisions en 1992 et l'impact accru du commerce illégal dans le secteur du tabac constituent les principaux facteurs qui expliquent cette révision à la baisse. Quant aux transferts fédéraux, ils ont été moins élevés de 71 000 000 $. Enfin, les dépenses ont fait l'objet d'une gestion rigoureuse qui a contribué à les rendre inférieures de 248 000 000 $ à l'objectif du dernier budget. Ce résultat confirme la ferme détermination du gouvernement à contrôler efficacement la taille du secteur public. Et je dépose, M. le Président, avec la permission de cette Chambre, le tableau suivant qui présente les résultats préliminaires des opérations financières du gouvernement pour 1992-1993, année qui se terminait le 31 mars dernier. Les facteurs, M. le Président, qui ont marqué négativement l'année qui vient de s'écouler, seront encore à l'œuvre en 1993-1994. Quatre mois se sont écoulés depuis la publication du document « Vivre selon nos moyens», qui faisait état de l'urgence d'agir. Or, la nécessité du redressement se fait encore plus pressante aujourd'hui, cela pour trois raisons. Tout d'abord, les informations des derniers mois indiquent que le rendement des impôts et taxes est un peu plus faible que ce qui était prévu. On pense d'abord à la taxe sur les tabacs, où le phénomène de fraude a pris une ampleur encore un peu plus prononcée. De plus, il appert que les entreprises ont accumulé pendant la récession des pertes plus importantes qu'on ne l'avait cru, pertes qu'elles déduisent maintenant de leur revenu imposable. Ensuite, les prévisions économiques utilisées en janvier étaient basées sur celles de la moyenne des prévisionnistes, alors que les prévisions du présent budget sont légèrement inférieures. Enfin, les transferts fédéraux doivent de nouveau être révisés à la baisse; les données les plus récentes confirment que la récession a touché les autres provinces encore plus et encore plus lourdement que le Québec. La capacité fiscale du Québec relativement à celle des autres provinces est donc plus forte que nous ne le pensions, et nous allons perdre des revenus de péréquation. Ainsi, la situation des finances publiques ne s'est pas améliorée depuis le moment où nous l'avions décrite comme étant préoccupante. Nous avions alors affirmé que, si rien n'était fait, le déficit atteindrait 6400 000 000 $ en 1993-1994. En fait, les données disponibles aujourd'hui nous indiquent que, sans aucune mesure du côté des revenus ou des dépenses, le déficit aurait pu atteindre 7 400 000 000 $. Dans ces circonstances, M. le Président, la consultation que nous avons menée auprès de nos concitoyens aura été un exercice des plus utiles. En effet, les messages exprimés devant la commission parlementaire font écho à ceux que nous entendons dans nos comtés à travers tout le Québec. Il peut y avoir discordance sur les modalités d'action, mais un large consensus se dégage concernant les grandes orientations à suivre. Premièrement, nos concitoyens se montrent, à bon droit, exigeants à l'égard de l'administration publique, qu'ils voudraient voir plus performante et capable de livrer au meilleur coût des services publics de qualité. Deuxièmement, ils comprennent très bien les dangers de l'endettement qui peut entraîner une réduction des perspectives d'avenir d'une société. Troisièmement, peu d'entre eux affirment que l'on devrait augmenter le fardeau général des impôts et des taxes. Ils s'interrogent par contre sur le caractère équitable du régime fiscal en se demandant si toutes les dépenses fiscales sont bien justifiées et si les contribuables à revenus supérieurs font leur juste part. Comme gouvernement, il est de notre devoir de répondre à ces préoccupations de nos concitoyens. Il est clair que les Québécois sont prêts à faire les efforts requis pour se sortir au plus vite du piège de l'endettement. Le présent budget propose donc une stratégie et un ensemble de moyens pour y parvenir. Il est clair aussi que le premier choix de nos concitoyens est celui d'effectuer le redressement par la voie de la réduction des dépenses. C'est là aussi le premier choix de notre gouvernement. C'est pourquoi le présent budget propose: la mise en place d'une stratégie agressive de limitation des dépenses budgétaires; mais aussi une réduction significative de ce qu'il est convenu d'appeler les dépenses fiscales, c'est-à-dire les diverses déductions et exemptions permises par la fiscalité, puisqu'elles ont des impacts similaires aux dépenses budgétaires elles-mêmes. Il est clair enfin que nos concitoyens vont nous épauler dans cette tâche avec d'autant plus d'énergie qu'ils auront l'assurance du caractère équitable de l'opération et la conviction que chacun contribue à l'effort en fonction de sa capacité de le faire. Ce budget propose donc aussi d'exiger une plus grande contribution de ceux qui ont une capacité de payer supérieure à la moyenne et d'apporter plusieurs améliorations à la politique fiscale et budgétaire pour en accentuer l'équité et demeurer favorable à la croissance économique. La première étape de cette politique, M. le Président, a été franchie avec succès lors de la préparation des crédits 1993-1994. Protéger l'avenir, c'était d'abord limiter au maximum la progression des dépenses. Les coupures les plus importantes ont touché, comme il se doit, les dépenses de fonctionnement, qui ont été amputées de près de 6 %, ce qui devrait nous rapprocher de nos objectifs de plus grande efficacité de l'administration publique. Un effort a aussi été demandé aux employés du secteur public et à ceux qui, comme les médecins, les députés ou les ministres, ont une rémunération basée sur la politique salariale du gouvernement. Nous avons proposé, pour toutes ces catégories, un gel des salaires de deux ans aux niveaux qui prévalaient le 1er avril dernier. Enfin, nous avons réduit les subventions aux particuliers ou entreprises, entraînant une réduction globale de plus de 5 % de ce type de dépenses. Le total des mesures de compression approuvées au cours de la préparation des crédits s'élève à 1 400 000 000 $. Il s'agit d'un montant deux fois plus important que le montant de compressions le plus élevé qui ait été réalisé depuis 1986-1987. Qu'il me soit permis ici de reconnaître la qualité du travail accompli par le Conseil du trésor et son président qui, avec la collaboration de tous nos collègues, ont rendu possible un résultat aussi remarquable. Toutefois, pour répondre aux exigences de nos concitoyens, il nous faut certainement aller au-delà des progrès accomplis jusqu'ici. Sur le plan financier, la politique que nous proposons aux Québécois est d'imposer des plafonds très rigoureux à l'augmentation des dépenses au cours des prochaines années. J'annonce donc aujourd'hui une réduction additionnelle des dépenses de 150 000 000 $ en 1993-1994 qui, conjuguée à la révision à la baisse de la prévision du service de la dette de 79 000 000 $, entraînera une diminution des dépenses de 229 000 000 $ par rapport aux prévisions initiales. J'annonce aussi qu'à compter de l'an prochain la croissance des dépenses de programmes, c'est-à-dire les dépenses excluant le service de la dette, sera plafonnée à 1 % par année. Cette stratégie est ambitieuse mais elle correspond à la volonté des Québécois de se sortir au plus vite du piège de l'endettement. Pour parvenir à ces résultats, une démarche de remise en question des services publics et des façons de les fournir à la population est déjà entreprise. Nous devons toujours avoir à l'esprit que les ressources financières du gouvernement ne sont pas plus grandes que celles des contribuables. Dans ce contexte, j'annonce dès aujourd'hui trois mesures supplémentaires de rationalisation des dépenses. Premièrement, un réexamen de l'organisation gouvernementale en vue, notamment, de réduire le nombre de ministères et d'organismes et de diminuer les coûts de fonctionnement de l'administration publique est présentement en cours. Dans un premier temps, certains aménagements affecteront en particulier l'organisation du Conseil exécutif, le ministère de l'Éducation, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, le ministère des Communications et le ministère du Tourisme. La restructuration ainsi amorcée sera complétée en apportant les aménagements qui toucheront d'autres ministères et organismes en cours d'année. Un des éléments de cette restructuration que je suis en mesure d'annoncer aujourd'hui concerne la Commission des normes du travail qui verra son mandat élargi pour prendre à sa charge le programme d'allocation de maternité. De plus, le transfert au ministère du Revenu de ses fonctions de prélèvement des cotisations est examiné en vue de disposer d'un guichet unique de prélèvement et de vérification pour les entreprises. Par ailleurs, un certain nombre d'employeurs, et en particulier ceux du secteur public, sont présentement exemptés de contribuer à ce régime, alors que leurs salariés peuvent utiliser les services de la Commission, notamment en cas de litiges avec leur employeur. Ces exemptions seront abolies, ce qui rendra plus équitables les modalités de financement de la Commission des normes du travail et permettra de réduire le taux de cotisation à cet organisme. Deuxièmement, on sait que, lorsque la Régie de l'assurance-maladie rembourse au pharmacien le coût d'un médicament destiné à une personne âgée ou à un prestataire de la sécurité du revenu, elle doit généralement défrayer le coût du médicament prescrit par le médecin, alors que le même médicament produit sous une autre marque de commerce peut être moins cher. Or, il existe des écarts de prix parfois très élevés à ce niveau et cette pratique est très coûteuse pour le gouvernement parce que les marques les plus connues ne sont pas nécessairement les moins chères. Il apparaît donc opportun de modifier les programmes de médicaments de façon à ce que, règle générale, le remboursement soit fait sur la base du prix du produit le moins cher, à moins que le médecin traitant n'indique qu'aucune substitution de médicament ne peut être effectuée. Cette mesure sera élaborée en tenant compte de ses répercussions sur l'industrie pharmaceutique et devrait prendre effet à compter du 1er janvier prochain. Je tiens à rappeler que cette mesure n'aura pas d'impact sur les bénéficiaires de ces programmes, qui continueront d'obtenir les médicaments que leur état requiert. Le programme de services optométriques devra, quant à lui, être réservé à ceux qui en ont le plus besoin. Dorénavant, seuls les services offerts à des bénéficiaires de moins de 18 ans ou de 65 ans ou plus seront gratuits. Un règlement adopté à cette fin par le gouvernement entrera en vigueur dès la date de sa publication dans la Gazette officielle du Québec. Les handicapés visuels et les prestataires de la sécurité du revenu continueront d'être pleinement couverts pour les services optométriques. De plus, dans le but de maintenir le dépistage des maladies telles que le glaucome, l'examen partiel de la vision demeurera assuré. Un volet majeur de notre démarche concerne par ailleurs le financement des services publics par les usagers. Parce que aucun service public n'est gratuit dans les faits, nous devons appliquer une politique de responsabilisation des consommateurs de ces services en les faisant participer à leur financement lorsqu'ils en ont les moyens. Notre intention est de faire un examen complet à ce niveau. Les deux secteurs les plus importants, ceux de la santé et de l'éducation, ne sauraient en être soustraits . Dans le domaine de la santé, notre première tâche sera de discuter avec le gouvernement fédéral d'amendements à la loi canadienne sur la santé afin d'obtenir une plus grande liberté d'action en ce domaine. Comme on l'a déjà évoqué, de tels assouplissements nous permettraient, par exemple, de pouvoir prélever des contributions d'usagers soit au moment d'une visite médicale, soit au moment de la déclaration d'impôt sur la base des services de santé reçus. De telles contributions auraient l'avantage de rationaliser la consommation de services médicaux sans remettre en question le principe d'accessibilité des services, étant donné la protection qui serait accordée aux personnes à faibles revenus. De plus, et de plus en plus, la population du Québec se montre disposée à accepter de telles modifications dans le but de préserver un régime qui lui tient à cœur et je compte sur son appui pour obtenir des assouplissements en ce sens. J'ai l'intention d'aborder cette question lors de la Conférence fédérale-provinciale des ministres des Finances, des 30 et 31 mai prochains, qui doit porter sur une stratégie commune face au problème de la dette. Nous sommes bien d'accord pour participer à un effort de réduction de la dette, mais encore faut-il pouvoir disposer de tous les moyens pour le faire. Dans le domaine de l'enseignement supérieur, nous sommes la province où les frais de scolarité sont les plus faibles. C'est pourquoi notre intention est de les aligner sur la moyenne de ceux payés au Canada. Une mesure semblable a le mérite de faire contribuer les étudiants au financement de leurs études, tout en protégeant l'accessibilité par le biais du régime d'aide financière aux étudiants. Je compte là aussi sur l'appui de la population du Québec pour concrétiser cette pièce importante de notre stratégie de redressement des finances publiques. De plus, dans l'intervalle, nous avons l'intention de continuer à encourager les institutions postsecondaires à poursuivre leur recherche de l'excellence. À cet effet, nous sommes prêts à envisager avec elles une révision de la marge accordée aux universités pour moduler leurs frais de scolarité. Afin d'accroître l'efficacité du secteur public, notre démarche nous amènera aussi à examiner les modifications additionnelles à apporter au partage des fonctions assumées par le gouvernement du Québec, les municipalités et les commissions scolaires. Au cours des derniers mois, les représentants du monde municipal et ceux des commissions scolaires se sont d'ailleurs montrés ouverts à discuter avec le gouvernement des conditions à mettre en place en vue de permettre un partage mieux équilibré des ressources et des responsabilités. C'est dans cette perspective que notre gouvernement compte poursuivre avec nos partenaires de ce secteur des discussions concernant cette question au cours des prochains mois. M. le Président, plusieurs témoignages entendus au cours de nos consultations ont remis en question la pertinence et l'équité de ce qu'il est convenu d'appeler les dépenses fiscales. J'ai donc entrepris avec mes collègues un exercice de réévaluation et, pour chacune d'entre elles, nous nous sommes demandés si elle avait encore sa raison d'être dans un contexte d'austérité comme celui qui s'impose présentement. L'exercice s'est avéré des plus utiles. Parmi les dépenses fiscales que nous avons décidé de conserver intactes, cependant, je dois mentionner tout d'abord l'ensemble des mesures d'aide aux familles. On sait que notre gouvernement a mis en place un régime particulièrement avantageux qui fait en sorte que le soutien accordé aux familles a plus que triplé depuis notre arrivée au pouvoir, passant de 800 000 000 $ à 2500 000 000 $. À mon avis, l'appui ainsi accordé représente une sorte de contrat conclu entre elles et le reste de la société. Les familles ont certainement pris pour acquis que ce contrat serait respecté, comme en témoigne la hausse du taux de natalité observée depuis 1988. Je crois que la société doit respecter sa partie de l'engagement malgré la conjoncture difficile, et c'est pourquoi le régime québécois d'aide aux familles sera maintenu. Il sera même amélioré. D'une part, nous avons pris soin de maintenir les seuils d'imposition nulle des familles et, pour ce faire, nous augmenterons les montants de réduction d'impôt des familles de manière à compenser les effets des resserrements dans les dépenses fiscales annoncées aujourd'hui. D'autre part, le gouvernement entend réévaluer prochainement le financement des services de garde à l'enfance dans le but d'y apporter les correctifs appropriés. Les dépenses fiscales destinées à assurer aux retraités des revenus adéquats seront, elles aussi, maintenues. Malgré leur caractère très coûteux, les dispositions qui encouragent l'accumulation de l'épargne en vue de la retraite doivent être conservées. Il s'agit là de mécanismes qui permettent un investissement dans l'avenir que nous aurions tort de ralentir. Le régime fiscal comporte aussi des dispositions pour soutenir le revenu de ceux qui sont déjà à la retraite, comme le crédit d'impôt en raison d'âge et le crédit d'impôt pour revenu de pension. La majorité des retraités actuels n'ont pas eu la possibilité d'accumuler les épargnes nécessaires à une retraite confortable parce qu'ils ont gagné des revenus que nous avons peine à imaginer aujourd'hui. Nous nous devons de maintenir ces avantages fiscaux jusqu'à ce que les mesures d'encouragement à l'épargne aient produit tous leurs effets et jusqu'à ce que la situation relative des personnes âgées se soit suffisamment améliorée. Un volet majeur de notre politique culturelle est constitué de mesures fiscales comme le crédit d'impôt à la production cinématographique et télévisuelle, l'exemption de taxe de vente sur les livres, l'abolition des droits sur les divertissements ou encore l'ouverture à l'industrie culturelle des régimes d'aide à la capitalisation. Notre gouvernement est fermement engagé dans une démarche de valorisation de la culture québécoise, d'appui à la création, de soutien à l'emploi et de consolidation de cette industrie. Dans ce contexte, il est essentiel de maintenir les incitations fiscales en faveur de la culture. Notre fiscalité comporte de nombreuses dispositions fiscales dont l'objectif est de contribuer au développement de l'économie. Il ne s'agit pas de réduire d'un iota l'engagement de notre gouvernement à l'égard du développement économique, un engagement dont le premier ministre a toujours fait sa priorité. Mais, comme ces mesures bénéficient presque exclusivement aux contribuables à revenus élevés, nous avons le devoir de ne conserver que celles dont l'impact économique est le plus important. M. le Président, le régime d'épargne-actions est certainement le plus important des instruments développés pour favoriser la levée de capital de risque. À l'origine, il cherchait aussi bien à fournir aux entreprises du Québec le capital de risque qui leur faisait défaut qu'à développer chez les Québécois un intérêt accru pour le marché boursier. Je crois cependant qu'il est temps aujourd'hui de restreindre nos objectifs à l'égard de ce régime. Il existe encore des entreprises qui éprouvent des difficultés à s'approvisionner en capital de risque. C'est de celles-là dont il faut s'occuper, mais uniquement de celles-là. J'annonce donc que, dorénavant, aucune déduction ne sera accordée pour des acquisitions d'actions de grandes entreprises, sauf pour les émissions qui sont déjà en cours. Seule subsistera la déduction actuelle pour les achats d'actions d'entreprises dont l'actif est inférieur à 250 000 000 $. Par ailleurs, le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec a connu une expansion remarquable. À la faveur d'un régime fiscal que nous avons voulu particulièrement avantageux, il dispose maintenant d'un actif dépassant les 800 000 000 $, lequel a pu être largement investi dans l'entreprise québécoise à des fins de création et de protection d'emplois, tout en poursuivant des objectifs d'éducation économique des travailleurs et des travailleuses du Québec. L'ampleur des succès obtenus par le Fonds de solidarité n'a pas été sans soulever un certain nombre de difficultés pour ses compétiteurs sur les marchés de l'épargne et du placement et pour le Fonds lui-même qui s'est retrouvé avec des liquidités excédentaires par rapport aux normes auxquelles il doit se conformer. Par ailleurs, d'autres centrales syndicales ont fait valoir qu'il y aurait un avantage pour la société québécoise à ce qu'elles puissent elles aussi travailler à l'éducation économique de leurs membres à l'aide d'un mécanisme de ce genre. Leurs représentants témoignent ainsi de leur constant engagement à l'égard du développement économique et social du Québec. Certaines institutions financières ont aussi manifesté un intérêt marqué pour ce type de véhicule financier. Il y a donc lieu tout d'abord de chercher à mieux contrôler l'évolution de la situation, tout en permettant au Fonds de solidarité de continuer de jouer son rôle fondamental pour les travailleurs et les travailleuses ainsi que pour l'économie du Québec. C'est pourquoi j'annonce que pour deux ans, soit du 2 mars 1993 au 1er mars 1995, le crédit d'impôt pour les actions de catégorie «A» du Fonds ne sera applicable qu'à une tranche maximale de 75 000 000 $ d'actions par année. Dans l'intervalle, une nouvelle politique globale concernant ce type de véhicule financier sera élaborée. Des consultations seront menées auprès de tous les milieux intéressés et, au cours de cette période, l'encadrement actuel devrait être maintenu. La ministre déléguée aux Finances continuera par ailleurs de veiller à l'épanouissement de l'ensemble du secteur financier québécois. En mars dernier, elle publiait un énoncé de politique, en vue d'accroître l'efficacité de ce secteur, de renforcer sa stabilité et de soutenir sa croissance. Les mesures qui découleront de cet énoncé sur le plan de la politique fiscale et budgétaire seront annoncées ultérieurement en cette Chambre. De plus, la fiscalité québécoise comporte un mécanisme de levée de capital de risque auprès d'investisseurs externes pour des projets de recherche et de développement. Ce mécanisme a soulevé certaines difficultés d'intégrité fiscale et c'est pourquoi j'annonce aujourd'hui son abolition. Les entreprises concernées pourront, bien entendu, compter sur les mécanismes réguliers pour leur approvisionnement en capital de risque et continueront de bénéficier d'un régime d'encouragement qui demeurera le plus généreux au Canada. Les dépenses fiscales pour appuyer la formation de la main-d’œuvre correspondent à un besoin manifeste et seront maintenues; nous y apporterons même un certain nombre d'assouplissements. On en trouvera le détail à l'Annexe sur les mesures fiscales et budgétaires, laquelle fait partie intégrante du présent discours. Les dispositions fiscales pour favoriser le développement et la diffusion de la technologie correspondent elles aussi à un besoin manifeste. C'est le cas, par exemple, du crédit d'impôt bonifié aux entreprises qui font faire de la recherche par les universités. J'annonce aujourd'hui qu'il sera prolongé pour deux autres années. Par contre, les frais généraux reliés à la recherche, qui sont présentement admissibles au crédit d'impôt au même titre que les salaires des chercheurs, atteignent des proportions qu'il serait souhaitable de limiter. Un plafond sera donc appliqué, limitant ces frais généraux à 65 % des salaires versés aux chercheurs. Parmi les mesures d'appui à certains secteurs particuliers, la fiscalité minière s'avère particulièrement avantageuse. De 1987-1988 à 1991-1992, le gouvernement a encaissé des droits miniers de 43000 000 $, mais il a déboursé des montants qui totalisent 165 000 000 $ au titre du crédit de droits remboursable pour perte, pour un déboursé net de 122 000 000 $. Il n'est pas normal que les droits miniers coûtent de l'argent au gouvernement au lieu de lui en rapporter. J'ai donc demandé à mes fonctionnaires de procéder à une réévaluation complète de la fiscalité minière, en collaboration avec ceux du ministère de l'Énergie et des Ressources et en consultation avec les représentants de l'industrie. L'objectif est de mettre en place pour le 1er janvier prochain un régime de droits miniers qui cesse d'être déficitaire, tout en demeurant favorable au développement de cette industrie stratégique pour plusieurs régions du Québec. J'ai, par ailleurs, l'intention de maintenir notre politique d'accès à du financement externe pour les entreprises d'exploration minière. Afin, donc, de maintenir un niveau d'exploration minière bénéfique pour les régions périphériques du Québec, j'annonce la prolongation du régime des actions accréditives pour les années 1994 et 1995. J'entends aussi apporter des resserrements majeurs à un certain nombre de dépenses fiscales qui sont reliées à l'acquisition d'un revenu. Celles-ci touchent à la fois les particuliers et les entreprises. Plusieurs employés se voient offrir par leurs employeurs le paiement de certaines primes d'assurance. Le bénéfice ainsi accordé est soumis à l'impôt pour la partie d'une assurance-vie collective qui excède 25000$. Mais ce bénéfice n'est pas imposable pour la première tranche de 25000$ d'une telle assurance ni dans le cas des régimes privés d'assurance-maladie. Les personnes qui ne bénéficient pas de régimes ainsi fournis par leur employeur doivent en défrayer le coût à partir d'un revenu qui a déjà fait l'objet d'imposition. Une plus grande équité exige l'abolition de ce privilège. J'annonce donc que les avantages ainsi accordés par les employeurs deviennent imposables entre les mains des employés. Depuis quelque temps, les frais de repas et de divertissement sont déductibles à 80 % plutôt qu'à 100 % dans le calcul du revenu des entreprises. Le président américain a proposé, quant à lui, de ne les rendre déductibles qu'à 50 %. À mon avis, nous devons nous assurer que les dépenses remboursées à des employés, généralement de niveau supérieur, ou encore effectuées pour leur bénéfice se limitent à ce qui est vraiment nécessaire pour les fins de l'entreprise. C'est pourquoi, à compter de demain, les frais de repas et de divertissement ne seront déductibles qu'à 50 % dans le calcul du revenu des entreprises. Chaque employeur doit, comme on le sait, verser 3,75 % de sa masse salariale à titre de contribution au Fonds des services de santé. Cette contribution est versée non seulement au bénéfice de ses employés mais aussi de tous les citoyens couverts par le régime de santé au Québec. Il s'ensuit que seuls les revenus de salaires sont assujettis à une contribution tandis que toutes les autres catégories de revenus en sont exemptées. Or, c'est l'ensemble des citoyens du Québec qui bénéficient des services de santé dont les coûts ne cessent de croître et, bien qu'il soit plus simple de ne faire payer que les salariés et leurs employeurs, il est préférable de mettre en place une politique plus équitable. C'est pourquoi, afin que les salaires ne soient pas la seule source de revenus faisant l'objet d'une contribution, j'annonce l'instauration, pour le bénéfice du Fonds des services de santé, d'une contribution de 1 % sur toute autre forme de revenu présentement assujetti à l'impôt, à l'exception des pensions alimentaires. Cette contribution commencera à s'appliquer dès la présente année d'imposition. Elle sera cependant déductible de l'impôt sur le revenu, sous forme de crédit personnel au taux de 20 %. Afin de protéger les contribuables à revenus inférieurs, les premiers 5000 $ de tels revenus seront exemptés. Le taux de 1 % s'appliquera sur la partie de ces revenus comprise entre 5000 $ et 20 000 $. Entre 20 000 $ et 40 000 $, la contribution sera plafonnée à 150 $. En haut de 40 000 $, le taux de 1 % s'appliquera de nouveau, mais la contribution ne pourra jamais excéder 1000 $, soit 800 $ après la déduction possible du crédit d'impôt personnel. En 1988, le gouvernement fédéral a abandonné la déduction automatique pour emploi. À cette époque, nous avons fait le choix de conserver cette déduction dans la fiscalité québécoise pour des considérations d'équité entre salariés et travailleurs autonomes. Nous avons depuis lors resserré le traitement fiscal accordé aux travailleurs autonomes, de sorte que nous pouvons maintenant nous harmoniser à la fiscalité fédérale en éliminant cette déduction. Nous le ferons dès la présente année d'imposition, ce qui permettra de simplifier le régime fiscal, tout en préservant l'équité nécessaire entre les diverses catégories de contribuables. De plus, afin de placer les députés et les ministres ainsi que les employés à commission sur le même pied que les salariés à ce titre, une mesure analogue sera appliquée à l'égard de leurs allocations non imposables ou de leurs dépenses déductibles. Une autre source de différence entre les fiscalités fédérale et provinciale est intervenue à l'occasion des réformes simultanées de 1988. En effet, le gouvernement fédéral a alors transformé en crédits d'impôt les déductions pour cotisations à l'assurance-chômage et au Régime de rentes du Québec et la déduction pour les dons. Pour sa part, le Québec a conservé l'ancienne formule. Ainsi, le régime québécois avantage les contribuables à revenus élevés et il introduit un élément de complexité non nécessaire dans la fiscalité. J'annonce donc que, dès la présente année d'imposition, les déductions pour cotisations à l'assurance-chômage et au Régime de rentes du Québec et celle pour les dons seront transformées en crédits d'impôt au taux de 20 %. Présentement, les prestations versées par la Commission de la santé et de la sécurité du travail ne sont pas imposables. Plusieurs citoyens se posent des questions sur le caractère équitable de ce traitement, que l'on soupçonne aussi de ne pas favoriser l'incitation au travail et d'accroître les coûts du régime de santé et de sécurité du travail. On constate effectivement que certains prestataires voient augmenter leur revenu disponible après avoir quitté temporairement leur emploi pour être pris en charge par le régime. Il s'agit là, évidemment, d'une situation qui n'était certainement pas dans l'intention du législateur et qui est inacceptable en termes d'équité comme en termes d'incitation au travail. J'ai donc l'intention de la régulariser dans les plus brefs délais par la mise en place d'un mécanisme de prise en compte simultanée des effets du régime de prestations et du régime fiscal sur la situation des personnes concernées. Les détails quant à la façon de le faire restent cependant à être précisés et ils seront annoncés le plus tôt possible. Nous examinerons en même temps la pertinence d'appliquer le même mécanisme aux prestations versées par d'autres régimes de ce type. Le Québec a instauré depuis quelques années une disposition fiscale permettant d'atténuer le fardeau des impôts fonciers des ménages à faibles revenus. Il est ainsi possible de faciliter le financement des municipalités et des commissions scolaires sans pénaliser les ménages à faibles revenus pour lesquels un impôt foncier peut représenter une part trop importante de leur revenu. Le principe de cette mesure est donc pleinement justifié. Cependant, la formule de calcul comporte des lacunes qui amènent dans certains cas des problèmes de double compensation qu'il importe de corriger. En même temps, nous modifierons le taux de récupération de ce crédit pour en concentrer les bénéfices chez les contribuables à plus faibles revenus. Nous ferons d'ailleurs de même pour le crédit de taxe de vente. Il existe enfin un montant minimal pour la taxe que les entreprises défraient sur la base de leur capital versé. Ce montant n'a pas été ajusté de manière appropriée depuis l'instauration de cette taxe en 1979. Afin de régulariser cette situation, le montant minimal de taxe sur le capital sera porté de 125 $ à 250 $. L'ensemble des mesures de resserrement des dépenses fiscales, que je viens d'énumérer, permettra d'en réduire les coûts pour le gouvernement de 1 100 000 000 $ pour une pleine année d'imposition. En même temps, nous aurons rendu le régime fiscal plus équitable et nous aurons fait en sorte que le présent budget ne comporte aucune hausse des taxes à la consommation ni aucune hausse généralisée des taux d'imposition. Être équitable, c'est aussi exiger davantage de ceux qui ont les moyens de contribuer davantage. Nous devons là aussi répondre à cette préoccupation pour une fiscalité progressive, c'est-à-dire qui protège vraiment les plus démunis et fasse augmenter l'effort de contribution à mesure qu'augmente la capacité de payer. Le régime mis en place par notre gouvernement au cours des années peut être qualifié de progressif. Il est même plus progressif que ceux des gouvernements qui nous entourent. Nous avons cependant pris soin de ne pas accentuer le caractère progressif de la fiscalité québécoise au point de la rendre non concurrentielle et défavorable à la croissance économique. C'est ce qui nous a amenés à réduire les taux marginaux les plus élevés dans la table d'imposition du revenu, lorsque furent effectuées les réformes de 1986 et de 1988. Les conditions ont maintenant changé. Le président américain envisage la mise en place d'une surtaxe pour les contribuables à revenus élevés et une surtaxe du même type et d'un niveau élevé existe déjà en Ontario et en Colombie-Britannique. D'après le budget de l'Ontario, d'hier, c'est une surtaxe qui a encore été déclarée plus élevée. Il est donc devenu possible d'accroître la progressivité du régime fiscal québécois tout en maintenant sa compétitivité par rapport à ceux des régions avoisinantes. C'est pourquoi j'annonce aujourd'hui l'instauration d'une surtaxe à l'impôt sur le revenu pour les contribuables à revenus supérieurs. Cette surtaxe sera égale à 5 % de l'impôt à payer excédant 5000 $ et à 5 % de plus pour l'impôt à payer excédant 10000 $. Une telle surtaxe ne s'appliquera qu'à des niveaux de revenus supérieurs à la moyenne. La première tranche de la taxe ne touchera, par exemple, que les contribuables gagnant plus de 32 500 $ dans le cas d'un célibataire et que les contribuables gagnant plus de 45 460 $ dans le cas d'une personne mariée ayant deux enfants à charge. La seconde tranche commencera à s'appliquer à des niveaux de 54 300 $ et de 63 480 $, dans chacune des deux situations que je viens de mentionner. Ce deuxième palier permettra de prélever une contribution fiscale plus importante à mesure que s'élève le revenu. Une seconde façon d'augmenter la progressivité du régime fiscal est de réduire la possibilité, pour les personnes à revenus élevés, d'utiliser les dépenses fiscales pour diminuer leurs impôts de façon trop importante. Il existe déjà un mécanisme à cette fin, que l'on appelle l'impôt minimum de remplacement, et qui vise à empêcher un contribuable de réduire son impôt à payer en bas d'un certain plancher. J'annonce aujourd'hui deux dispositions qui viendront accentuer la portée de l'impôt minimum de remplacement. Le taux en sera haussé de 16 % à 20 %, dès la présente année d'imposition, ce qui permettra de relever le plancher que je viens d'évoquer. De plus, le compte pour investissement stratégique dans l'économie québécoise sera aboli en 1994, de sorte que toutes les dépenses fiscales seront désormais prises en compte dans le calcul de cet impôt. Les mesures que je viens d'annoncer auront pour effet d'augmenter de 226 000 000 $, sur une pleine année, la contribution fiscale des personnes à revenus supérieurs. À chaque année, M. le Président, depuis notre arrivée au pouvoir, notre gouvernement a pleinement indexé les crédits d'impôt personnels. En fait, depuis 1990, l'indexation accordée a même été de 0,7 % supérieure à l'évolution du coût de la vie. Depuis quelques années, cependant, le gouvernement fédéral et ceux des autres provinces appliquent une politique d'indexation beaucoup moins généreuse que la nôtre, basée sur la partie de l'inflation qui excède 3 %. Comme l'inflation prévue pour 1993 est inférieure à 3 %, aucun autre gouvernement au Canada n'accordera le bénéfice de l'indexation en 1994. De plus, le niveau actuel de l'inflation compte parmi les plus faibles depuis l'après-guerre, de sorte que son impact sur le pouvoir d'achat des consommateurs est beaucoup plus facile à absorber qu'auparavant. À l'heure où tous doivent mettre l'épaule à la roue pour redresser la situation des équilibres financiers, force nous est de suspendre pour cette année l'application de notre politique d'indexation. Les crédits d'impôt personnels et les allocations familiales du Québec demeureront donc au même niveau en 1994 qu'en 1993. La même approche sera appliquée dans le domaine de la sécurité du revenu, mais nous exempterons cependant les bénéficiaires inaptes au travail, qui verront leur prestation indexée. Les barèmes des programmes APTE et APPORT seront eux aussi maintenus l'an prochain à leur niveau de 1993. De plus, le gouvernement a l'intention du suspendre, pour la prochaine année, l'indexation des autres programmes de transferts aux particuliers, organismes et entreprises. Le président du Conseil du trésor fera une recommandation au Conseil des ministres au cours des prochaines semaines quant aux programmes devant être affectés par cette mesure. Le travail au noir, M. le Président, la fraude fiscale et l'ensemble des autres moyens permettant à certaines personnes d'éluder le paiement des impôts et taxes préoccupent à juste titre la majorité de la population qui se conforme à la législation fiscale. Notre gouvernement est aussi très sensible à ce problème. Notre intention est donc d'entreprendre un effort particulier pour en atténuer l'ampleur et notamment de revoir au cours de la présente année l'ensemble des activités de perception et de vérification du ministère du Revenu pour nous assurer du maximum d'efficacité de ces opérations. Les délibérations tenues en commission parlementaire ont mis en évidence la nécessité de simplifier le régime fiscal et de le rendre aussi favorable que possible à la croissance économique. À ce titre, la complexité du régime de taxe de vente du Québec implanté au cours des dernières années a été tout particulièrement mise en lumière. On se rappellera qu'à la suite de l'application de la taxe fédérale sur les produits et services, nos efforts pour simplifier la fiscalité nous avaient amenés à réformer la taxe de vente du Québec et à convenir avec le gouvernement fédéral d'une administration unique des taxes fédérale et provinciale par le ministère du Revenu du Québec. Certains des avantages alors escomptés en termes de simplicité pour les contribuables et les mandataires tardent cependant à se manifester. Une façon de simplifier davantage le régime serait de prélever la TVQ d'une manière identique à la TPS et donc de la percevoir à chaque étape du processus de production. Une telle méthode n'a pas été mise en place par le Québec en raison de l'incertitude concernant la compétence constitutionnelle des provinces d'appliquer un tel régime. Malgré le caractère souhaitable d'une telle harmonisation, la taxe québécoise aurait été soumise à une insécurité peu désirable tant pour le gouvernement que pour les contribuables. Toutefois, à la suite d'un jugement récent de la Cour suprême dans le renvoi de l'Alberta relativement à la TPS, l'harmonisation des deux régimes apparaît désormais beaucoup plus facilement réalisable, bien que l'incertitude ne soit pas encore entièrement levée. Il m'est possible d'indiquer ce soir que des démarches sont présentement en cours pour que cette question soit finalement portée devant la Cour suprême. Lorsqu'un jugement aura été rendu, et dans la mesure où il sera favorable à une telle harmonisation, nous procéderons dès que possible à la mise en place d'une dernière phase d'harmonisation des régimes de la taxe sur les produits et services et la taxe de vente du Québec. Une réforme de ce type nous permettra de simplifier l'administration du régime, d'accroître la compétitivité de nos entreprises et d'atteindre ainsi l'objectif recherché depuis le début. Conformément à la stratégie de redressement des finances publiques présentée en janvier dernier dans le document «Vivre selon nos moyens », le gouvernement entend poursuivre sa politique d'utilisation accrue de la tarification des services publics au cours des prochaines années. En ce qui a trait aux sociétés d'État, nous maintiendrons nos efforts pour en améliorer la rentabilité, poursuivre notre politique de privatisation et limiter leur rôle à ce qui ne peut être réalisé au moins aussi efficacement par le secteur privé. Par ailleurs, je désire aujourd'hui annoncer une réforme majeure de la structure financière de l'une d'entre elles. La Société de l'assurance automobile du Québec est une société d'État réputée pour la qualité de sa gestion. Ses efforts pour réduire le nombre et la gravité des accidents de la route ont remporté des succès remarquables. Ils lui ont permis de réduire les contributions d'assurance des automobilistes sans point d'inaptitude de 140 $ en 1986 à 105 $ aujourd'hui. Ils ont également contribué à l'accumulation, en plus de sa réserve actuarielle de 2 800 000 000 $, d'un excédent qui atteignait 1 500 000 000 $ à la fin de 1992. Cet excédent et les revenus de placement qu'il génère masquent cependant un problème de compatibilité entre les revenus et les dépenses de cette Société. Comme le savent les automobilistes, les contributions d'assurance automobile ne sont pas indexées, ni au coût de la vie ni à l'évolution des salaires. Il n'en va pas de même des prestations à verser aux accidentés qui augmentent à chaque année au rythme de l'inflation et des salaires perdus par les accidentés. Déjà cette année, la Société se retrouve en déficit d'opération important. Il serait bien sûr possible de laisser le surplus accumulé s'épuiser avant d'agir. Cela signifierait des augmentations de contributions d'assurance atteignant entre 40 % et 60 % à débourser par les automobilistes dès ce moment. Un tel scénario signifierait en outre que les automobilistes continueraient pendant les prochaines années de payer des contributions inférieures aux bénéfices qu'ils retireraient du régime. Il m'apparaît approprié d'opter plutôt pour une approche adaptée à la situation et de réorganiser dès maintenant la structure financière de la Société de l'assurance automobile. J'annonce donc qu'à compter du 1er janvier prochain, sans affecter la facture totale des automobilistes, nous procéderons à un nouveau partage des contributions d'assurance payables à la Société et des droits d'immatriculation payables au gouvernement, de manière à ce que les revenus de la Société soient augmentés et correspondent structurellement à ses dépenses. Par la suite, ce nouveau partage sera, si nécessaire, modifié de nouveau à l'avantage de la Société de l'assurance automobile, de manière à préserver l'équilibre entre ses revenus et ses dépenses. Toutefois, je suis persuadé que, comme par le passé, la Société poursuivra ses efforts pour réduire les coûts du régime et améliorer sa performance, de façon à éviter d'avoir recours à une indexation des contributions d'assurance. Cette nouvelle organisation financière entraînera des impacts majeurs sur les équilibres financiers du gouvernement et de la Société. En effet, la nouvelle structure ne requiert plus la mise de côté de montants comme ceux qui apparaissent à ses derniers états financiers et qu'elle se proposait de retourner aux assurés en retardant le moment et l'ampleur des hausses de contributions à acquitter. Un montant de 675 000 000 $ sera donc remis au gouvernement en 1993-1994, ainsi qu'un montant de 325 000 000 $ en 1994-1995, ce qui permettra de réduire le déficit budgétaire. D'autre part, le nouveau partage des droits d'immatriculation implique une perte de revenus de 30 000 000 $ pour le gouvernement en 1993-1994 et de plus de 120 000 000 $ par année par la suite. Après un certain nombre d'années, les montants ainsi transférés par le gouvernement à la Société dépasseront les montants remis au gouvernement cette année et l'an prochain. Ainsi, les automobilistes, qui se trouvent aujourd'hui à apporter une contribution non négligeable au redressement des finances publiques du Québec, seront finalement gagnants, puisque l'opération aura pour effet de réduire les montants qu'ils auront à débourser tout en garantissant l'équilibre financier du régime. Je ne saurais passer sous silence, M. le Président, le rôle crucial que devront jouer les transferts fédéraux dans notre démarche de retour à l'équilibre des finances publiques. En effet, depuis quelques années, le gouvernement fédéral a appliqué une série de mesures destinées à réduire la croissance des transferts qu'il verse aux provinces. Dans le cas particulier du Québec, cette politique a eu comme effet de réduire la part des transferts fédéraux dans ses revenus budgétaires de 28,9 % en 1983-1984 à 20,1 % cette année. De plus, en l'absence de changements, une telle tendance se poursuivrait dans les années à venir. Les transferts fédéraux font ainsi partie du problème des finances publiques du Québec. Et ils devraient faire partie des solutions. Le Québec a donc accueilli avec intérêt l'intention du ministre fédéral des Finances de procéder à une réforme des principaux programmes de transferts aux provinces. Selon nous, la réforme à entreprendre devrait faire en sorte que le fardeau du redressement des finances publiques soit supporté plus équitablement entre les deux paliers de gouvernement, assurer une meilleure redistribution de la richesse entre les régions et augmenter l'efficacité du secteur public canadien. Eh bien, M. le Président, examinons maintenant les équilibres financiers découlant du présent budget. Au moment de la publication du document «Vivre selon nos moyens», le gouvernement proposait à la population un plan rigoureux de redressement des finances publiques à compter de 1993-1994. L'objectif de déficit envisagé pour 1993-1994 était, dans ce document, de 4701 000 000 $. Par la suite, le déficit devait être réduit graduellement de façon à presque atteindre l'équilibre des opérations courantes en 1996-1997 et dégager des surplus à ce titre à compter de 1997-1998. Nos concitoyens nous ont indiqué leur volonté de voir le gouvernement s'attaquer rapidement au problème du déficit. Nous sommes tout à fait d'accord pour limiter le recours à l'endettement, de manière à préserver notre liberté d'action pour le futur et conserver notre accès privilégié aux marchés financiers. C'est dans ce contexte que notre gouvernement se donne maintenant des objectifs financiers qui vont encore plus loin que ceux du scénario de redressement graduel présenté dans «Vivre selon nos moyens». Les mesures annoncées aujourd'hui au plan des revenus comme à celui des dépenses constituent un premier pas dans cette direction. Compte tenu des resserrements majeurs mis en œuvre par ce budget, je suis particulièrement heureux d'annoncer que le déficit 1993-1994 sera réduit à 4 145 000 000 $. Il s'agit d'une baisse de 833 000 000 $ par rapport au déficit de 1992-1993 et d'une baisse de 3 300 000 000 $ par rapport à ce qui se serait produit si aucune mesure n'avait été prise au chapitre des revenus et des dépenses. Je dépose ici, M. le Président, avec la permission de l'Assemblée, ces tableaux qui présentent les prévisions des équilibres financiers du gouvernement pour 1993-1994. M. le Président, en poursuivant les efforts entrepris cette année, notre gouvernement vise à réduire rapidement le recours à l'endettement. Le déficit sera réduit d'environ 1 000 000 000 $ par année à compter de 1994-1995. Il sera ainsi possible de dégager un surplus budgétaire de 300 000 000 $ en 1997-1998. Je parle pour nous, pas pour vous. De plus, avec sa politique de limitation de la croissance des dépenses de programmes à 1 % par année, le gouvernement pourra réaliser un surplus au titre des opérations courantes dès 1996-1997. Le plan de réduction du déficit mis de l'avant par le gouvernement aujourd'hui nous permettra donc de cesser alors d'emprunter pour payer ce qu'il est convenu d'appeler les dépenses d'épicerie. Un tel plan sera bénéfique pour les générations futures et contribuera à la vigueur de la croissance économique au cours des années à venir. En ce qui a trait aux besoins financiers nets, ils devraient baisser à 3 100 000 000 $ en 1993-1994 et poursuivre leur diminution pour se situer à 540 000 000 $ en 1996-1997. Et, en 1997-1998, le gouvernement devrait même enregistrer un surplus financier net de 845 000 000 $ et être en mesure alors de commencer à rembourser sa dette directe. M. le Président, l'équilibre des finances publiques constitue un élément essentiel de notre politique plus globale en faveur de la croissance économique et de la création d'emplois. Je n'ai pas besoin de rappeler l'engagement de notre gouvernement à cet égard. Depuis 1985, nous avons mis en place un ensemble de politiques, de stratégies, de plans d'action et de mesures et nous avons déployé des énergies considérables dans le cadre d'une politique économique résolument orientée vers le renforcement de la compétitivité. En effet, avec l'ouverture des marchés, seule une société compétitive peut à la fois prospérer, créer des emplois et atteindre ses objectifs sociaux, éducatifs et culturels. En bref, pour répondre aux enjeux soulevés par la restructuration industrielle et la mondialisation de l'économie, le gouvernement s'est donné une politique économique qui couvre la majorité des facteurs de compétitivité que sont la capitalisation, la recherche et le développement, les relations de travail et la participation des travailleurs aux bénéfices, la qualité totale, la formation, l'automatisation de la production et la promotion de l'environnement. Comme on a pu le constater, notamment lors de la consultation générale sur le financement des services publics au Québec, cette politique jouit d'un large degré d'appui dans la population et chez nos partenaires du monde des affaires. Notre stratégie fait d'ailleurs l'envie des gouvernements environnants et elle a été endossée par des observateurs avertis au Canada et même ailleurs dans le monde. Grâce aux gestes posés, le gouvernement, les dirigeants d'entreprises et les travailleurs coopèrent davantage pour construire les bases d'une société et d'une économie prospères. Le véritable défi, aujourd'hui, est d'utiliser tous les moyens possibles pour réussir ensemble le développement de toutes les régions du Québec. Cette première étape franchie, le Québec peut maintenant s'attaquer avec plus d'énergie encore au problème persistant du chômage et de la pauvreté qu'accentue la mutation industrielle en cours. C'est pourquoi le gouvernement a décidé d'étendre son approche actuelle en matière de politique économique pour être en mesure d'aller plus loin et plus vite encore dans son action face aux défis qui se dessinent d'ici l'an 2000. L'importance d'agir vient de l'accentuation de l'état de dépendance de plusieurs milliers de personnes et de certaines régions à l'égard de l'État. Le gouvernement tout autant que ses partenaires est préoccupé par ces problèmes. Il faut redonner l'espoir et la dignité à tous ces Québécois et ces Québécoises en leur facilitant l'accès au marché du travail. Actuellement, un trop grand nombre de travailleurs qui occupaient des emplois stables depuis de nombreuses années viennent graduellement augmenter le nombre des chômeurs et des assistés sociaux, trop souvent parce qu'ils n'ont pas les compétences requises pour occuper les nouveaux emplois. De même, il faut mieux préparer nos jeunes à faire face aux exigences croissantes du marché du travail en leur donnant accès à une formation technique ou professionnelle qui correspond aux besoins de nos entreprises. Enfin, les mesures d'adaptation et de réinsertion de la main-d’œuvre au marché du travail ne produisent pas toujours les résultats escomptés parce que les emplois ne sont tout simplement pas disponibles en nombre suffisant, même s'il existe des pénuries de main-d’œuvre qualifiée dans certains secteurs. Il faut donc mieux former les ressources humaines, créer des emplois et favoriser la création de nouvelles entreprises dans toutes les régions du Québec. Il existe actuellement au Québec un large consensus sur les orientations de base que devrait prendre une intervention gouvernementale plus musclée en faveur de l'emploi. Des pistes d'action prometteuses ont été suggérées, notamment lors de la consultation générale sur le financement des services publics au Québec. Chose certaine, l'objectif ne pourra être atteint sans la réalisation d'actions sur plusieurs plans. Il faudra simultanément renforcer la politique d'adaptation en faveur des entreprises et des travailleurs touchés par la restructuration industrielle et accentuer la lutte au chômage et à la pauvreté en initiant des actions innovatrices en faveur de la réinsertion sur le marché du travail des chômeurs chroniques et des assistés sociaux. Il est important aussi de préparer l'avenir en nous assurant de la compétence future de la main-d’œuvre. Dans cette optique, il faudra améliorer la formation technique et professionnelle de nos jeunes, réduire le décrochage scolaire et rapprocher l'école et l'entreprise. Comme moyen pour favoriser ce rapprochement le gouvernement entend recourir davantage aux formules d'apprentissage et d'alternance travail-études, accroître les possibilités de stage en entreprise et favoriser la réalisation de projets conjoints entre les entreprises et les établissements d'enseignement. Il faudra également renforcer les moyens actuels et en mettre en place de nouveaux pour stimuler l'émergence d'entreprises à forte valeur ajoutée en élaborant une stratégie PME, afin de convaincre les entrepreneurs de l'importance d'investir davantage dans la formation, la recherche et le développement, la qualité totale et l'accès à de nouveaux marchés, et donner aux régions des outils additionnels afin qu'elles prennent en main leur développement. Il est impérieux, par ailleurs, de donner à l'ensemble des actions gouvernementales un caractère plus favorable au développement de l'économie. Dans cette perspective, il faudra sans tarder moderniser le Code du travail, éliminer les tracasseries administratives et revoir la réglementation imposée aux entreprises, afin d'accroître l'efficacité de l'économie et de réduire le travail au noir et l'évasion fiscale. Enfin, il faudra évaluer l'intérêt de privatiser certaines entreprises ou services publics dans des domaines où le Québec pourrait par son action stimuler la création d'entreprises de taille mondiale et appuyer un renforcement de sa structure industrielle. Cette obligation de résultats rend plus impérieux que jamais d'agir de concert avec l'ensemble de nos partenaires socio-économiques. Une réduction importante du chômage par l'éducation, la formation et la création d'emplois ne peut être envisagée de façon réaliste sans mettre à contribution, sur une base concertée, gouvernement, employeurs, syndicats, écoles et communautés. C'est dans cette perspective que le gouvernement propose aujourd'hui à ses partenaires de se joindre à lui dans une action d'envergure. Le but est de concrétiser, au cours des prochains mois, un plan d'action concerté basé sur des objectifs réalistes pour remettre le Québec au travail. Le gouvernement compte par la suite rendre public un ensemble de mesures pour lesquelles il dégagera les sommes requises à l'intérieur des objectifs financiers évoqués précédemment. Comme le gouvernement va demander à ses partenaires de se joindre à cet effort collectif, tout ceci va contribuer à accélérer la reprise. Le projet est ambitieux parce qu'il fait appel à des changements importants, mais il est à la mesure de notre capacité de mettre nos forces en commun pour atteindre un objectif certes exigeant, mais également emballant, parce que généreux et porteur d'avenir. M. le Président, en conclusion, la société québécoise se retrouve aujourd'hui confrontée à un défi de taille. La faiblesse de l'économie observée depuis bientôt trois ans aura entraîné des dommages considérables pour les travailleurs, pour les consommateurs, pour les entreprises, tout comme pour les administrations publiques. Le budget que je viens de présenter à cette Assemblée propose une stratégie énergique de redressement de la situation. Nous avons à recentrer l'action de l'État pour le ramener à sa mission fondamentale, aussi bien lorsqu'il intervient par le biais des dépenses de programmes que lorsqu'il utilise les dépenses fiscales, les entreprises publiques ou la réglementation. Nous avons à rendre l'État plus efficace, autant dans la gestion des dépenses publiques que dans la perception des revenus. Nous devons en particulier articuler correctement les rôles et les responsabilités des divers paliers d'administration et de gouvernement. Nous avons aussi à rénover les modes de financement de l'État et à rendre la fiscalité plus équitable, plus progressive et plus favorable à la croissance économique. Nous avons surtout à nous sortir rapidement du piège de l'endettement en évitant, dans toute la mesure du possible, de recourir à des hausses généralisées du fardeau fiscal. Apprendre à vivre selon nos moyens, c'est une première façon de nous construire une économie forte, capable de s'imposer sur des marchés qui deviennent de plus en plus compétitifs. Notre véritable défi, c'est en effet celui de créer davantage d'emplois dans toutes les régions du Québec. La mutation industrielle en cours nous amène aujourd'hui à étendre la portée de notre politique économique pour accentuer nos efforts en matière de développement des ressources humaines et de création d'emplois. C'est pourquoi nous proposons aujourd'hui à nos partenaires socio-économiques de nous engager dans une action d'envergure pour remettre au travail l'ensemble du Québec. L'engagement de notre gouvernement pour la création d'emplois est total. Il nous amène à prendre aussi, avec la même détermination, un engagement à poursuivre le redressement des finances publiques. De plus, les consultations pré budgétaires que nous avons tenues nous donnent l'assurance que l'ensemble des Québécois et des Québécoises sont disposés à déployer avec nous les efforts nécessaires pour relever ce double défi. Ils comprennent en effet la nature des enjeux. Ils savent que nous avons aujourd'hui à nous redonner les moyens de bâtir ensemble, pour nous et pour nos enfants, un avenir qui soit à la mesure de nos ambitions. Voilà pourquoi, M. le Président, j'ai la conviction que la politique fiscale et budgétaire présentée aujourd'hui recevra l'assentiment de cette Assemblée et de toute la population du Québec. Et ainsi, je propose que l'Assemblée nationale, à l'unanimité je l'espère, adopte la politique budgétaire du gouvernement. Je vous remercie, M. le Président.